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Le climat et la campagne présidentielle

C’est hier, le 1er février, qu’est publié une tribune de 1 400 chercheurs sur le peu de place du climat dans la campagne électorale. Bien sûr, le sujet est abordé ici et là, plus par certains candidats que d’autres, mais rien à voir avec d’autres sujets comme les migrations et le pouvoir d’achat. Et pourtant, la question du climat sera déterminante pour notre avenir, pour nos choix économiques, pour nos modes de vie. Les chercheurs, d’origines variées, exhortent donc les candidats à s’emparer du sujet. D’autant que la manière d’aborder le sujet aujourd’hui est confinée et souvent simpliste, et ne permet pas aux électeurs de se faire une idée claire. « Ces simplifications finissent par créer une prison intellectuelle, qui empêche de mettre sur la table les choix qui s’offrent encore à nous, et d’en débattre de manière démocratique, c’est-à-dire publique, éclairée et contradictoire ».

Si le constat semble s’imposer, la question de la responsabilité de la situation, et par suite, de la manière de corriger le tir, mérite réflexion. Comment en est-on arrivé là ? « Tout le monde s’en fiche », avouait Nicolas Hulot. Pourquoi ?
Le monde politique traditionnel est sans doute englué dans les approches de leur origine. Le climat, comme l’environnement sous ses diverses formes, n’est pas dans sa culture. Il prend en charge le sujet, mais presqu’à regret, obligés et plutôt gênés que sont les vieux partis de devoir ajouter cette thématique à leurs causes de référence. Le climat doit entrer dans les cases idéologiques existantes, de gré ou de force, et chacun s’y emploie.
Quant aux partis dédiés à l’environnement, ils sont trop souvent tournés vers leurs militants auxquels il faut plaire avant tout. Quelle stratégie pour faire entrer leur cause dans la vie quotidienne ? S’il y en a une, elle n’st pas très apparente.
C’est que le débat politique n’est pas commandé par les partis, mais par l’état de l’opinion. C’est cette dernière qui impose les thèmes, influencés par les évènements et l’actualité (hausse du prix de l’énergie, COVID, etc.). Les candidats se positionnent par rapport à ces préoccupations, ce ne sont pas eux qui les imposent. Leur intervention consiste plutôt à pousser leurs points forts, les domaines où ils pensent être bien placés, pour les mettre au centre du débat. Le terrain de la bataille, plus ou moins favorable selon les orientations politiques, tel est l’enjeu.
L’environnement, le long terme, le climat, la biodiversité, sont-ils devenus un champ suffisamment constitué pour accueillir les adversaires ? Les forces politiques et sociales, associatives, universitaires et philosophiques soucieuses du climat sont-elles parvenues à placer celui-ci en tête des préoccupations des français ? oui si l’on en, croit les sondages, mais il est à craindre que ce ne soit qu’une réponse « politiquement correcte », bien-pensante, mais sans adhésion véritable. Ce sont des phénomènes complexes, pour des spécialistes, et qui nous dépassent, ne cherchons pas à feindre d’en être les organisateurs, pour paraphraser une formule célèbre. C’est un problème parce que la presse en parle, mais que puis-je faire moi-même, ici et maintenant ? L’adhésion risque fort de n’être que formelle, et non profonde, elle n’engage pas vraiment.
Les 1400 scientifiques qui s’adressent aux candidats devraient se poser la question : qu’avons-nous fait pour populariser les enjeux climatiques ? L’alerte à répétition, le sentiment d’angoisse qui, dit-on, fait des ravages dans la jeunesse, sont-ils de bons leviers pour recueillir un assentiment profond, porteur de décisions et d’actions concrètes ? Faire peur du futur n’est pas le meilleur moyen d’attirer les bonnes volontés, « on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre » dit la sagesse populaire. Il faut donner envie d’un futur attractif, ouvrir des perspectives engageantes, et le développement durable est riche d’opportunités qui le permettent. Au-delà du climat, c’est la qualité de la vie et le développement humain qui représentent des projets à proposer au débat politique, des projets POUR une vie meilleure, et pas une lutte CONTRE les catastrophes annoncées. Reprenons l’analogie du football. Le climat présente une équipe composée uniquement d’une défense. Comment voulez-vous qu’elle marque des points, qu’elle soit attractive, qu’elle ait des supporters de plus en plus nombreux et enthousiastes, si elle n’a pas d’attaque ?
Ne soyons pas surpris de la pauvre part laissée au climat dans le débat présidentiel. Il y a encore du travail pour donner envie d’une société durable.

Edito 2 février 2022

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