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200 millions d’euros par an

C’est ce que la presse nous apprend, pour le transfert de Cristiano Ronaldo dans un club d’Arabie Saoudite. Le salaire des footballeurs suscite souvent l’indignation. Beaucoup les considèrent indécents, en ces temps difficiles que nous traversons. Et pourtant, ils créent de la valeur en produisant une denrée décarbonée : des émotions. Quoi de mieux pour le développement durable ? Une activité économique fondée sur le talent, voire le génie de quelques jeunes gens, et maintenant de jeunes filles, c’est bien mieux que l’exploitation de la planète ou d’enfants triant les décharges, ou encore de la recherche de matières premières dans des conditions extrêmes. Une croissance économique fondée sur des émotions, qui nous donnent un réel plaisir, qui participent à notre qualité de vie, qui créent du lien social, voilà une manière de sortir, au moins partiellement, d’une économie de prédation de ressources qui deviennent rares. Avis à nos « capitaines d’industrie », dont beaucoup, hélas, s’évertuent à prolonger l’ère du carbone.
Le sport et la culture, voilà des activités à promouvoir sans modération pour décarboner nos sociétés. Attention toutefois aux effets secondaires. Le Tour de France cycliste est un excellent créateur d’émotions, mais les marchands du temple, avec leurs innombrables goodies, gâchent la fête en alourdissant son bilan carbone. Peut certainement mieux faire !
Dans beaucoup de sports et de spectacles, ce sont les produits dérivés qui posent problème, ainsi que le volume de transports qu’ils provoquent, pour les athlètes ou les artistes, et la foule des spectateurs. Un sujet de plaisanterie pour l’entraîneur du PSG, mais un point faible qui ne peut rester sans réponse. Les partenariats et autres parrainages sont nécessaires pour équilibrer les comptes, mais il n’y a pas de raison pour que les partenaires et les parrains soient exemptés du devoir de décarbonation au même titre que les autres activités économiques.
Un autre point mérite l’attention. C’est le volet « influenceur » des vedettes, sportives ou culturelles. Les « trompettes de la renommée » chantées par Georges Brassens ne sont pas sans effets sur les admirateurs des champions et des célébrités « vues à la télévision ». Effet favorable, quand il promeut les activités sportives ou culturelles, quand il donne envie de les pratiquer, mais déplorable quand il montre des comportements de domination, ou agressifs, et des modes de vie hyper carbonés, grosses voitures, week-ends à l’autre bout du monde, steaks en or, dépenses extravagantes, tout en payant ses impôts dans un pays plus favorable. La notoriété, surtout si elle est exploitée, confère aussi des responsabilités. Les vedettes deviennent vite des modèles, avec leurs bons et leurs mauvais aspects.
Les émotions donnent du contenu à nos vies. Certaine sont gratuites, d’autres coutent des fortunes. Certaines sont hors du champ économique, d’autres y jouent un rôle central. A l’époque de sa gloire, on disait que Brigitte Bardot rapportait autant à la France que la régie Renault. Peut-être un fantasme, mais significatif de ce que peut représenter la culture et le sport dans l’économie d’un pays.
Si le sport et la culture peuvent détourner la consommation de biens matériels vers des produits décarbonés, n’hésitons pas à payer sportifs et artistes autant que des grands patrons, ils nous tirent dans la bonne direction.

Edito du 11 janvier 2023

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