Perspective
A l'opposé d'un retour en arrière, le développement durable doit ouvrir de nouvelles perspectives.Même l'abandon de filières qui, à l'usage, apparaissent trop dangereuses, doit être porteur d'avenir.
La perspective de sortir du nucléaire revient en débat. Un débat qui nous rappelle que cette technique a toujours été considérée comme une transition, en attendant d’autres techniques.
La quantité d’uranium disponible dans le monde, et les problèmes géopolitiques liés à son contrôle, limitent le développement de cette voie qui ne répondra au mieux, à son summum, qu’à une part minoritaire de nos besoins en énergie. La question n’est donc pas de sortir ou non du nucléaire sous sa forme actuelle, mais de savoir à quelle échéance, à quel rythme, et au Profit de quelles autres solutions pour répondre à nos besoins.
Le discours alarmiste des Cassandre, nombreux en période de crise, laisse un goût amer. Il laisse penser que l’écologie impose un abandon, un Recul. Ses détracteurs ont beau jeu d’agiter le spectre du retour aux cavernes et à la bougie, caricatures grossières mais parfois suscitées par des comportements extrêmes. Les Nous l’avions bien dit ne provoquent jamais l’enthousiasme, et donnent une impression de refus du Progrès. La mise en avant des Défauts et des Limites de chaque nouvelle technique, comme on a pu le voir récemment sur les ampoules basse consommation et les LED, renforcent l’idée que quoi qu’on fasse, ce ne sera jamais bien. Ce n’est pas sur ces bases que l’on construit l’Avenir, et que l’on mobilise les énergies et les Compétences pour y parvenir.
La perspective de sortie du nucléaire n’est une Catastrophe que si elle s’opère dans la panique, brutalement, sans préparation. A l’inverse, voulue et programmée, elle doit devenir une opportunité. Faisons de la sortie du nucléaire un challenge mobilisateur. Sans pression, il n’y a pas de progrès.
La période est délicate, avec la lutte contre le réchauffement climatique, et la raréfaction des ressources conventionnelles en énergie. Il y a encore beaucoup de pétrole, de charbon et de Gaz à exploiter, et au Prix actuel du baril, on peut aller les chercher dans des conditions Extrêmes, mais figurez-vous qu’il faut aussi protéger l’eau douce, les océans, la biodiversité, les Paysages. Il faut sortir à la fois du Carbone et du nucléaire, tout en préservant la vie sous toutes ses formes. Bref, nous sommes au pied du Mur, et d’un mur escarpé, compliqué, avec une bonne part d’inconnu. C’est un Exploit qui nous est demandé, et non un retour au Passé.
Il est donc légitime d’hésiter, de se demander s’il n’est pas possible de continuer comme avant, de ne rien changer. Il ne serait pas « durable » de se cramponner, de vouloir prolonger le passé.
L’expérience acquise dans le nucléaire ne doit pas être abandonnée pour autant. Un bilan de compétences de la filière doit permettre d’en tirer les potentialités, comme la maîtrise de procédures complexes, la connaissance de la matière, les techniques et les applications médicales, et bien d’autres choses encore, à transposer pour répondre aux besoins de demain. C’est un nouveau départ, sur de nouvelles orientations, pour valoriser Autrement un Capital accumulé en 40 ou 50 ans.
Le secteur du bâtiment nous montre que l’exploit est possible. Les performances attendues à la suite du Grenelle paraissaient à beaucoup hors de portée, à la fois techniquement et financièrement. Les premières opérations, malgré quelques déceptions, témoignent de l’engagement de nombreux acteurs, et de leur capacité à entrer dans une nouvelle époque. Les exemples abondent.
Inauguré le 15 mars dernier, le siège social d’ETDE, un concentré d’innovations dans une logique de coût global, affiche des consommations très performantes, 45 kWh énergie primaire/m²/an, pour un Prix supérieur de 10% à celui d’un immeuble classique RT2005. Des Panneaux photovoltaïques situées sur le Toit devraient permettre de ramener le bilan à 35 kWh ep/ m²/an (1). Autre exemple, plus spectaculaire, La Tour Elithis, à Dijon. Consommation négative (légèrement) dès la première année ( -1,51 kWh ep/m2 Shon/an, chauffage Bois + rafraîchissement + ventilation + Pompes et auxiliaires + Eclairage + photovoltaïque). Economies de charges de plus de 2000 € pour une Surface de 500m2, pour des loyers équivalents à ceux du marché, et un Coût de construction de 1.400 euros HT par m2 (2). Ces deux exemples ne sont qu’une partie visible d’un iceberg en cours de constitution. Il y a des Echecs, des erreurs, il y a sans doute aussi du maquillage, mais globalement le Mouvement est lancé, et sa puissance est impressionnante.
Pourquoi le bâtiment, qui n’a pas la réputation d’être le secteur le plus en flèche, serait-il le seul à réussir l’exploit ? L'industrie nucléaire dispose d'un capital technique et humain qui doit bien permettre de nouvelles orientations, si la décision en est prise.
L’écologie et ses exigences, qui se manifestaient hier pour lutter contre le réchauffement climatique, et qui prennent aujourd’hui la forme d’une sortie à terme du nucléaire, constituent de formidables challenges, ceux dont une société a besoin pour secouer ses Habitudes. La Peur et les Résistances au changement sont naturelles, il faut savoir les Dépasser, et ce sont les épreuves qui nous conduisent à l’accepter en définitive. Une simple acceptation par nécessité, outre qu’elle mobilise difficilement la créativité, ne positionne guère une économie dans un contexte en évolution rapide. Mieux vaut prendre les devants, anticiper. Pour ouvrir des perspectives. C’est ça, le développement durable.
1 - Selon Le Moniteur.fr du 20 septembre 2010.
2 - Source : Thierry Bièvre, Directeur général, Elitihis, au mardi d'APOGEE du 15 mars 2011
Chronique mise en ligne le 21 mars 2011
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