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Progrès et Innovation

Aventure

 

Séduisante et inquiétante la fois. L’aventure présente ces 2 aspects, de découverte et de respiration d’un coté, de crainte de l’inconnu de l’autre. Le développement durable est la recherche d’une nouvelle étape dans l’aventure humaine.

einsteinLe développement durable est une recherche collective. L’avenir n’est pas écrit, il ne sera pas la suite « ordinaire » du présent. Il nous faut l’inventer, et dans des territoires encore inexplorés pour beaucoup. Pour beaucoup, c’est une aventure, avec les défauts qui vont avec : les incertitudes, la peur de se tromper, le risque de perdre ce qui a été durement acquis. Pour d’autres, au contraire, le mot « aventure » fait rêver. Sortir des lignes tracées à l’avance les réjouit, et ils sont prêts à se lancer pour peu qu’ils y voient des perspectives encourageantes.

Il s’agit en définitive de redéfinir le progrès. L’idée même du progrès donne un sens à l’histoire. Beaucoup se trouvent rassurés de s’inscrire dans un grand mouvement qui emporte tout. Le « main stream », qui tire sa légitimité de son ampleur même, et qui porte le monde. Rien de plus inquiétant que de sortir du rang, seul ou à peu près, pour contester cette marche puissante, dont beaucoup refusent de voir qu’elle nous mène vers le précipice, tels des lemmings. Le progrès n'est plus alors dans le sens de l'histoire. Il faut en reedéfinir les contours.
Le développement durable n’est pas l’affaire des conservateurs, qui tentent de faire durer le passé plutôt que de tourner la page et d’entrer dans une ère nouvelle. Les efforts de nombreuses grandes entreprises pour prolonger l’ère de l’énergie carbonée sont à ce titre significatifs. Il est vrai que l’alternative dérange. Elle change les habitudes, demande de nouvelles compétences, s’appuie sur une organisation sociale différente et qui reste à mettre sur pied. Ces difficultés font penser qu’elle coûte cher, plus cher que les énergies conventionnelles, et c’est vrai si on se contente d’un calcul tronqué, où l’exploration de voies nouvelles n’est pas valorisée. Continuons donc comme avant, cherchons des ressources nouvelles, tant pis pour le carbone déstocké des couches géologiques, tant pis pour l’effet de serre, on verra plus tard.

La vraie aventure, celle qui nous conduit vers un avenir durable, n’est pas l’exploitation des pôles, mais la recherche d’un mode de vie qui nous permette de les préserver tout en continuant à améliorer notre qualité de vie. Le « facteur 4 », deux fois plus de bien-être en consommant deux fois moins de ressources(1), représente une ambition autrement plus exaltante de que prolonger à tout prix une situation condamnée à terme. Quel dommage que tant d’énergie et de talent soit absorbés par cette dernière orientation, et stérilisés pour le vrai progrès et la prolongation de l’aventure humaine.
Le principe d’innovation, tant sociale que technologique, est constitutif du développement durable. Un autre principe vient brouiller les cartes : le principe de précaution. Il est là, justement, pour éviter les aventures malheureuses. Le Docteur Frankenstein n’est jamais très loin, et l’enthousiasme des chercheurs pour l’objet de leurs recherches peut les aveugler. L’innovation entraîne inévitablement une prise de risque, et il faut à la fois la favoriser et l’encadrer. Cette double injonction peut paraître contradictoire, et elle peut l’être en effet si l’encadrement est excessif. Tous les risques ne doivent pas être pris, quand leurs conséquences seraient trop lourdes pour l’humanité. Ce n’est évidemment pas aux chercheurs d’en décider, qui seraient alors juges et parties. Le principe de précaution n’a de sens que dans les cas extrêmes, ce qui est d’ailleurs affirmé dans notre constitution, et il doit libérer la créativité du simple fait qu’il protège la société des abus potentiels.

Les principes d’innovation et de précaution sont donc étroitement liés, et offrent son cadre à l’aventure du développement durable. C’est une révolution dans les esprits, avec en tête l’avertissement d’Albert Einstein selon lequel on ne trouve pas de solution à des problèmes avec la mentalité qui les a créés. Le progrès n’est plus ce qu’il était. Ses bénéfices, autrefois évidents, ne le sont plus et son coût apparait souvent exorbitant. Il faut en redéfinir les contours, et lui redonner un sens, pour orienter la soif de dépassement de soi qui caractérise l’espèce humaine, pour qu’elle puisse poursuivre son aventure.

1 - Selon la présentation qui en est faite dans Facteur 4, Rapport au club de Rome, Ernst U. Weizsäcker, Amory B. Lovins et L. Hunter Lovins, 1997, Terre Vivante


 

 

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