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Politique

Extrêmes

La force de la simplicité, du simplisme souvent, fait le jeu des extrêmes. Une faiblesse apparente pour nos sociétés complexes, qui doivent gérer des intérêts multiples et faire vivre ensemble des cultures hétéroclites. Comment faire une force de cette diversité et résister aux extrêmes ?

 

Au singulier, Extrême évoque le dépassement de soi. Il s’agit d’aller au-delà de ses possibilités, de sortir des approches traditionnelles. Le développement durable a besoin de cet extrême-là, avec toutefois le garde-fou du principe de Précaution. Il n’a pas besoin, au contraire, des extrêmes au pluriel.

Il est bien connu que les extrémistes sont les meilleurs alliés des conservateurs, ceux qui veulent que rien ne bouge. Il est  facile à ces derniers de faire
Peur avec les élucubrations et les folles exigences des premiers, de manière à bloquer toute évolution, même modeste. Un vrai problème quand on sait que le développement durable doit être ambitieux pour réussir, et qu’il doit entraîner le plus grand nombre.
Il arrive souvent que les extrêmes soient du genre coucou. Ils s’installent dans un nid dont ils chassent progressivement leurs occupants. Ils ne les chassent pas vraiment, mais ils s’expriment à leur place, en faisant des dégâts. On l’a vu à Strasbourg à la réunion de l’OTAN, où des militants pacifistes ont été débordés par des groupes violents. On n’a en définitive parlé que de ces gens-là, oubliant le message porté par ceux auxquels ils se sont substitués. Les pacifistes en question se sentent floués, mais ils hésitent à dénoncer leurs compagnons de route. Ils pensent que leurs objectifs sont communs, même s’ils réprouvent les méthodes ; et la dénonciation n’est pas dans leur Culture.
Le développement durable est la construction du monde de demain, et nécessite l’émergence d’un consensus dur. C’est le fruit d’une bonne gouvernance d’obtenir que chacun se l’approprie, et à juste titre. C’est le contraire d’une vision de spécialistes à laquelle il nous est demandé de souscrire, en un consensus mou. L’
Ecoute des autres est la Condition première de ce consensus dur, et les extrêmes sont en général tellement sur leurs certitudes qu’ils n’écoutent guère. C’est ainsi que les groupes les plus imaginatifs, les plus créatifs, dont la société a un besoin urgent pour inventer le monde du 21e siècle, sont étouffés par leurs camarades extrémistes, leur voix perdue dans un brouhaha général.
Pas de développement durable sans écoute réciproque, et le comportement des extrêmes est par nature tourné vers des convictions
Absolues, qui ne supportent pas le débat. L’ennui est que les extrêmes sont souvent contagieux. Non que leurs compagnons ouverts au dialogue n’adhèrent à leurs idées, mais qu’ils ne s’y opposent pas, ou du moins pas avec suffisamment de force. Au final, les positions extrêmes apparaissent dominantes, et pourraient bien finir par le devenir, par lassitude devant la difficulté d’exprimer une positon relative, toujours plus compliquée à expliquer qu’une position absolue.
La montée des extrêmes dans le monde répond à cette règle. Et les extrêmes de bords opposés ne font que se renforcer, en prenant comme otages les modérés de leur propre camp. Les personnes de bonne volonté se sentent tenues par un devoir de solidarité envers ceux qui se font passer pour les fers de lance de leur communauté ; l’autisme des extrémistes d’un groupe finit par décourager les modérés de l’autre, qui craignent ne jamais trouver d’interlocuteur. On observe ce comportement dans de nombreux conflits, avec des escalades qui font le bonheur des ultras des deux partis. C’était le cas en Irlande du Nord, c’est toujours le cas au Moyen-Orient. Cette résonnance, au sens
Physique du terme, conduit naturellement à l’affrontement, avec le désir de domination et de victoire absolue, alors que chacun sait qu’il n’y a pas de solution sans composition, sans recherche de terrains d’entente et de coopération.
Extrêmes renvoie alors à absolu, à solution
Unique, au refus de considérer qu’il y a d’autres avenirs que ceux que l’on a imaginé de son côté. Nous sommes loin de l’attitude de recherche d’un monde nouveau.
Les confrontations d’intérêt sont normales, les difficultés de communication entre sociétés de traditions différentes aussi. On évoque la diversité culturelle comme une des composantes du développement durable. Sur chaque territoire, chaque communauté pourra ainsi bénéficier des apports des autres, fera preuve de curiosité et d’
Envie de découvrir leur originalité. Enrichissement mutuel garanti. Ce mélange de cultures constitue évidemment un défi à relever, les extrêmes disposent de leviers si faciles à utiliser pour déstabiliser des équilibres, d’autant plus fragiles que l’incompréhension réciproque guette. Le développement durable n’est pas un long fleuve tranquille, mais c’est ça qui est bien !

 



Chronique publiée le 9 avril 2009, revu le 31 janvier 2010

 

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