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Organisations sociales

Transformation

transformationAu sens du rugby. Un premier succès, l’essai, n’est pas complet sans transformation. Le développement durable a marqué un essai, en sensibilisant aux dangers d’une fuite en avant, mais il peine à le transformer, à mobiliser pour le changement.

Le développement durable a été mal « vendu ». Le premier acte a connu un réel succès, l’alerte face à la dégradation de l’environnement, victime du « progrès ». Un tel succès qu’il occupe encore tout l’espace et empêche le second acte de commencer, celui d’une réaction à l’alerte, de la recherche d’un autre « progrès », d’un développement « durable ». Ajoutons que l’alerte est souvent associée au sentiment d’une faute collective, ce qui lui donne une note moralisatrice, avec son cortège de « donneurs de leçons ». La réaction devrait donc être réparatrice, avec une dimension morale, et l’appel implicite à la pénitence, à la privation. Pas très mobilisateur… La transformation est en panne. Le discours du premier acte n’est plus de mise pour le second, il l’étouffe. Il en faut un autre, adapté à ce besoin d’entrainer le plus grand nombre sur la voie du développement durable.
L’idée d’une recherche, joyeuse, curieuse et sans préjugés, d’un avenir différent de ce que serait le simple prolongement du passé, est engluée dans la vision moralisatrice. Elle peine à émerger, malgré de nombreuses initiatives, qui restent partielles et souvent anecdotiques.  Démoralisons le développement durable, pour le libérer du poids du passé et ouvrir une nouvelle époque.
le développement durable progresse malgré toutes ces difficultés, la peur de l’avenir pour les uns, le déni des dangers pour d’autres, le conservatisme et la défense des situations dominantes. De nombreuses initiatives en attestent, mais il faut pour cela accepter de changer notre regard sur le monde, changer de mode de penser. Ajoutons, comme il ne peut s’agir que d’une recherche collective, le besoin de faire partager l’aventure humaine que représente cette mutation. Il faut donc donner envie du développement durable, le rendre attractif pour mobiliser le maximum de nos concitoyens, et mettre leur esprit d’entreprise au service de cette recherche.
La transformation exige donc un nouveau discours, où la menace de catastrophes serait confinée à un fond de décor, et non au rôle-titre. L’alerte laisse la place à l’opérationnel, aux solutions comme on a pu voir en marge de la COP 21, avec l’agenda des solutions. L’heure est aux expériences, aux success stories, avec l’obligation de fournir de la crédibilité aux initiatives de renouveau.
La question de la crédibilité est centrale. Beaucoup de politiques conduites aujourd’hui ne sont pas crédibles sur le long terme. Comme accorder du crédit à la recherche de nouveaux gisements d’énergie fossile, alors que l’on sait qu’il faudra abandonner à leur sort les3/4 des réserves d’ores et déjà connues ? Comment peut-on subventionner des productions ou des aménagements destructeurs de milieux naturels qui assurent gratuitement d’immenses services : ils régulent le régime des eaux, et offrent le gîte et le couvert à une biodiversité exubérante, assurance vie de l’humanité, pour ne prendre que ces deux exemples.
Ces politiques ne sont pas raisonnables, mais elles ont pignon sur rue, elles intéressent de nombreuses activités qui résistent et obtiennent des prolongations. Les équilibres économiques se sont construits avec elles, les situations acquises et l’inertie sont leurs meilleurs atouts. A l’inverse, l’évocation mille fois renouvelée des emplois que créerait le développement des énergies renouvelables ou l’agriculture biologique reste inaudible, et devient incantatoire. L’essai n’est pas transformé. Il ne suffit pas d’avoir raison pour gagner.
Sans doute le volet « moral » et le rappel de la catastrophe immanente interdisent de penser qu’il soit possible de vivre mieux sans avoir à souffrir, à payer pour les fautes commises. Le « double dividende » ne trouve pas grâce dans cet univers mental. L’idée que chacun puisse être gagnant tout en faisant gagner aussi la planète, la collectivité, est rejetée comme non conforme à la morale. La manière dont l’essai a été marqué complique sérieusement la tâche pour la transformation, pour rester dans une métaphore sportive. 
L’alerte et le passage à l’action ne font pas appel aux mêmes qualités. Ce ne sont pas les mêmes acteurs qui peuvent un jour crier gare, et le lendemain appeler à prendre le risque d’explorer des futurs inédits. A défaut de se transformer lui-même, le « lanceur d’alerte » doit laisser la place à l’entrepreneur.
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