Skip to main content

Organisations sociales

Déclencheur

Pris dans le feu de l'action, ou au contraire endormi dans un bien être tranquille, nous avons besoin de repères, d'évènements que nous suivons en permanence pour déclencher une action ou une réaction. Mais ces "déclencheurs" ne doivent pas masquer une réalité souvent plus complexe.


Heureusement qu’il y des alertes, des phénomènes déclencheurs de l’action. Des clignotants qui nous sortent d’une douce quiétude, qui nous mettent devant nos responsabilités.
Mais attention à de pas se laisser éblouir par ces signaux, à ne voir qu’eux sans penser à élargir le champ d’observation quand une alerte survient. C’est l’histoire de l’arbre qui ne doit pas cacher la forêt, bien connue. Deux poids lourds de l’actualité nous rappellent cette exigence.
L’effet de serre et la construction. Lancée sur la question centrale du réchauffement climatique, l’opération Grenelle de l’environnement débouche tout naturellement sur un Programme ambitieux de rénovation thermique des bâtiments. Les outils des Pouvoirs publics sont mobilisés dans ce sens, réglementation, crédit, Aides fiscales, etc. La Loi dite « Grenelle 2 » ajoute opportunément d’autres préoccupations, l’accessibilité des personnes handicapées et la conservation du patrimoine historique. Ces extensions auraient du mettre la puce à l’Oreille du législateur.
L’amélioration de la performance énergétique, pour reprendre les termes consacrés par la loi, est absolument nécessaire pour lutter contre l’effet de serre. Elle conduit à réaliser des diagnostics complets, sur l’enveloppe du bâtiment, Murs, toitures, sols, ouvrants, et sur les équipements produisant et utilisant de l’énergie, chauffage, chauffe-eau, etc. Ensuite, ce seront des travaux lourds d’isolation, et de modernisation des équipements. Bref une intervention exceptionnelle, qui touche de nombreux aspects de la construction. Avec une seule préoccupation au départ, l’énergie. Les extensions aux handicapés et au patrimoine montrent que de tels travaux offrent une occasion Unique de reprendre l’immeuble dans son ensemble. Il faut dépasser la simple approche énergétique. Les raisons sont bien connues : on ne reviendra pas deux fois sur le même bâtiment pour des interventions lourdes, et en faisant une réhabilitation d’ensemble, ça coûte bien moins Cher que de la faire par petits bouts, et on obtient de meilleurs résultats.
Le déclencheur, l’effet de serre en l’occurrence, à provoqué l’action, et c’est tant mieux. L’erreur est de se cantonner au traitement du seul phénomène déclencheur. Cette vision étroite, justifiée par le souci de faire simple, est souvent contre productive. Car l’amélioration thermique « aveugle » peut dégrader d’autres caractéristiques, comme l’acoustique et le renouvellement d’Air. A l’inverse, une rénovation thermique éclairée, ouverte à d’autres préoccupations, peut être mise à Profit pour une amélioration d’ensemble de l’habitat. Dans un pays comme la France, qui n’a pas la Culture de l’entretien et de modernisation en continu de ses bâtiments, la pression de la lutte contre le réchauffement climatique offrait une occasion unique de remettre à niveau le parc de logement, d’Ecoles, de bureaux, etc. Espérons qu’à la pratique les acteurs, propriétaires, locataires, Professionnels de la rénovation, sauront corriger le tir, mais cela aurait été tellement plus satisfaisant que ce soit inscrit dans la loi ! Cela aurait permis de concocter des règles techniques et des instruments financiers adaptés à cette vision d’ensemble. Le déclencheur a fonctionné comme un flash, il a ébloui les décideurs au lieu de les éclairer.
Les retraites. Elles ne pourront plus être financées compte tenu de l’évolution démographique de notre pays. Le rapport actif / Inactif devient trop défavorable. Voilà le déclencheur. Fallait-il ne s’attaquer qu’à la question du financement des retraites, ou fallait-il ouvrir le champ de la réflexion ? Le vieillissement de notre population est un phénomène lourd de conséquences, et dans de nombreux domaines. Les structures de notre société, qu’elles soient « hard » comme les maisons, ou « soft » comme nos modes de penser, devront être revues au filtre de cette évolution. Une époque nouvelle de la vie, entre l’âge « actif » traditionnel et le grand âge, est apparue, où chacun peut encore s’activer, si l’on ose dire. Tous les aspects de la vie sont touchés, nos modes de transports et l’agencement des logements, la transmission du patrimoine entre Générations, la production de Richesses et leur Répartition. C’est une transition démographique qui se déroule aujourd’hui, entre une population jeune et en croissance régulière d’une part, et une population stable et vieillie d’autre part. Une transition aussi lourde de conséquences que la première que nous avons vécue au 19e siècle et que d’autres pays vivent aujourd’hui : entre une population à forte fécondité et forte mortalité d'un côté, et de l'autre une population en bonne Santé, qui doit réduire sa fécondité pour retrouver l’équilibre. Il faut tirer toutes les conséquences de ce phénomène, et ouvrir la réflexion sur l’organisation de la vie humaine dans ce nouveau contexte, sur le contenu à donner à ces années de vie en bonne forme que le Progrès nous a apportées.
Une approche purement comptable est réductrice, et ne permet pas de poser convenablement le problème. Les questions de la santé et de l’activité, du nouvel équilibre entre générations, du dynamisme d’une société où les vieux sont dominants, de l’Immigration et des relations avec les pays où les jeunes sont en excédent, et bien d’autres encore forment un tout. La bonne question n’est pas la retraite mais la transition démographique que nos vivons. Le déclencheur aurait du ouvrir ce débat, fondamental pour notre avenir, au lieu de se réduire en un marchandage qui occulte tous les autres aspects du problème.
Nous vivons dans des univers complexes, ce qui en fait la diversité et le charme. Isoler une question, quand bien même elle se pose avec acuité, pousse à des solutions bancales, fragiles, qui conduisent le plus souvent à reporter le problème plutôt qu’à le résoudre. Simplification est souvent synonyme de réduction de champ du possible, d’abandon de gammes entières de solutions. Le développement durable nous propose d’entrer dans la complexité, il faut chercher à comprendre les interactions, les antagonismes et les complémentarités, il faut arracher les œillères que le phénomène déclencheur comporte le plus souvent.

 

Chronique mise en ligne le 24 septembre 2010

  • Vues : 2816

Ajouter un Commentaire

Enregistrer