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Organisations sociales

Conservateur

montmartre

L’innovation, à la fois sociétale et technologique, à laquelle le développement durable nous invite rencontre inévitablement une forte résistance, du fait du conservatisme des institutions et des intérêts établis.
Le développement durable est la recherche d’un ou de plusieurs modes de développement, pour ouvrir de nouveaux espaces à l’humanité. Nous arrivons au bout d’un cycle, et nous cherchons comment engager le suivant.

Nous avons été habitués tout petits à raisonner dans un monde infini, avec la feuille de route « Croissez et multipliez ». Comme le dit Bertrand de Jouvenel, « Nous n’habitons pas la même planète que nos aïeux. La leur était immense, la nôtre est petite ». Il faut trouver une autre feuille de route, pour retrouver des marges de progression qui seront durables.
Les observateurs de conférences internationales sur le développement et l’environnement le disent en aparté : Chacun voit bien que l’on va dans le mur, mais on ne sait pas comment faire autrement. Les mécanismes de décision sont ancrés dans l’histoire et dans les cultures, les institutions sont conservatrices par essence. Seules les crises profondes créent des circonstances exceptionnelles, qui bouleversent l’ordre établi et permettent les transformations. Ces crises sont douloureuses. Dans l’histoire, ce sont des guerres, des famines et des épidémies, voire des incendies comme à Londres en 1666, qui ont obligé à repartir sur de nouvelles bases. Dans l’histoire moderne, les années 1944 et 1945 apparaissent comme fondatrices de nos institutions, tant nationale avec la mise en œuvre des résolutions du Conseil National de la Résistance, qu’internationale avec la création de l’ONU et les accords de Bretton Woods. Ce sont aussi les crises économiques, 1930 et le « new deal » qui a suivi pour en sortir, quelques années plus tard, mais qui n’a pas empêché la guerre de 1940.
Les crises d’aujourd’hui sont multiples. La crise financière tient la Une depuis 2008, et n’en finit pas de produire ses effets. Il y a aussi la crise des matières premières et de l’énergie, des crises alimentaires, et des crises culturelles, d’identité, qui provoquent des ravages. Et des crises moins visibles, structurelles, tectoniques pourrait-on dire, qui avancent en profondeur comme la crise de la biodiversité et le réchauffement climatique, qui ne se manifestent pas dans la vie de tous les jours, mais qui sont porteuses de chocs très profonds. L’ensemble de ces crises, de natures très variées, demande une réponse originale : nous allons vers l’inconnu. Donnons-nous les moyens de piloter cette exploration et l’avancée qui en résultera, ou bien subissons-nous cette évolution, avec fatalisme, en « croisant les doigts »s et en espérant que ça se passera bien ?
A défaut de lire l’avenir et de savoir le décrire, même avec des scénarii, plusieurs orientations peuvent être retenues, comme des pistes à explorer pour s’ouvrir des marges de manœuvre, et offrir à l’humanité des nouvelles perspectives. En voici 3, présentées en alternative à des pratiques actuelles, dont on sait qu’elles ne sont pas durables.
« Croissez et multipliez », telle était la feuille de route de l’humanité, pour découvrir le monde et le valoriser. Une croissance par expansion, en devenant plus nombreux, en allant plus loin chercher des ressources, en comptant sur demain pour apporter les réponses aux problèmes d’aujourd’hui. Forme de croissance que l’on peut qualifier de « minière », exploitant sans ménagement toutes les ressources aisément accessibles. Cette vision est à présent dépassée. Elle perdure par suite du conservatisme des intérêts établis, mais chacun sait qu’elle ne répond pas à l’observation que nous faisons chaque jour de la finitude du monde. La croissance de demain sera d’une autre nature, fondée sur la valorisation maximum des ressources disponibles, humaines et matérielles. Une croissance par intensification, et non plus par expansion.
La sélection est une manière de faire bien répandue, qui entraîne l’exclusion des non sélectionnés. Il s’agit des humains comme du « matériel génétique » des animaux et des végétaux. Une manière de faire et un état d’esprit qui renforce un modèle de développement prédéterminé et refuse d’aller voir ailleurs si d’autres modèles ne conviendraient pas mieux, pour faire face à l’inconnu qui se profile devant nous. La sélection se fonde sur les vertus nécessaires aujourd’hui, et tend à reproduire le modèle indéfiniment. A l’opposé, le « bilan de compétences » se fonde non pas sur un modèle existant, mais sur le potentiel observé, chez les humains et par extension dans tous les éléments constitutifs de notre planète. Valoriser ce dont nous disposons, en tirer le maximum de bénéfices pour la planète et l’humanité. Aller progressivement de la sélection, appauvrissante et conservatrice par nature, vers le bilan de compétences décliné à toutes les échelles, pour élargir le champ des possibles.
La concurrence s’exerce dans de nombreux domaines : chacun tente d’accroître sa part de marché de qui entraîne mécaniquement une croissance de la production. Pas de problème si la production est immatérielle, et ne demande que de l’ingéniosité et du savoir faire humain. La ressource est infinie, profitons-en, et offrons à chacun le meilleur cadre pour exprimer sa créativité. Ce n’est pas le cas pour les ressources matérielles, physiques ou biologiques. L’augmentation de la part de marché de chacun ne peut qu’accentuer la pression sur la planète. La recherche désespérée de pétrole, dans des conditions extrêmes et dangereuses, illustre cette dérive, que l’on observe aussi dans d’autres secteurs comme la pêche et tous ceux qui transforment des matières premières. Dans ces domaines, la coopération pour la valorisation des « biens communs », sera bien plus fructueuse que la concurrence.
Dan s ces 3 exemples, il ne s’agit pas d’abandonner immédiatement les principes d’expansion, de sélection et de concurrence, qui conservent quelques vertus et ont fortement marqué nos organisations sociales et économiques. Il faut néanmoins en comprendre les limites et leur substituer progressivement, ou les compléter par, d’autres principes qui ouvriront des espaces nouveaux.

 

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