Affiche
Pour réduire notre pression sur l'environnement, il faut en premier lieu comprendre comment elle s'exerce. Les conséquences environnementales de nos choix de consommation devraient être affichés avec le prix.
Les Murs des métros parisiens sont recouverts d’affiches proposant le Maroc à 40 euros. Très bien, mais il manque l’autre étiquette, celle du Prix environnemental. Quelle quantité de ressources investies dans ce voyage, quels rejets, quelle contribution à l’effet de serre ?
Depuis le 1er janvier 2011, les annonces immobilières doivent comporter la mention de la classe énergétique. Ce n’est pas difficile, puisque l’obligation de diagnostic de performance énergétique pour les transactions existe depuis quelque temps, et que les résultats sont connus. Il n’y a qu’à les afficher. Et malgré ça, il semble qu’il y ait des réticences, agences immobilières et propriétaires rechignent à délivrer cette information.
Pour les voyages, ce n’est pas une question de catégorie, de A à G comme pour l’immobilier, la voiture ou l’électroménager. On sait calculer tout simplement le poids de Carbone associé à un déplacement. De nombreux calculateurs sont à votre disposition pour cela, notamment sur les sites de réservation. Exemple, pour aller de Paris à Marseille, vous avez le Choix entre l’Avion, à 154 kg de carbone, la voiture (essence, 5CV) pour 128kg et le train pour 20kg (selon le calculateur actioncarbone.org). Je n’ai pas trouvé l’information pour le Vélo, mais compte-tenu des calories que doit consommer le cycliste pour parcourir la Distance, il est probable qu’il n’est pas meilleur que le train.
Reprenons notre affiche. Casablanca à 40 euros, 1900 Kilomètres aller et retour, et 416 kg de Gaz carbonique à l’aller et autant au retour, si on en croit le même calculateur. Ça fait 20 kg de carbone par euro dépensé. A comparer, par exemple, avec les 2kg de CO2 par euro dépensé quand vous achetez une petite voiture, ou aux 600 grammes attachés en moyenne aux produits alimentaires d’origine végétale.
C’est une grosse dépense, des euros lourds en carbone. Vous objecterez que 40 € est un tarif particulièrement bas, et que les tarifs aériens courants sont moins pénalisants en carbone/euro : 200 euros est un prix plus fréquent pour aller au Maroc. Ça fait quand même 4 kilos de carbone par euro dépensé, et surtout, changer de tarif ne change pas la quantité de CO2. Les produits d’appel vous donnent Envie, et vous attirent, sans vous dire que cet aller et retour au Maroc en avion vous fait consommer la moitié de ce qui serait raisonnable de dépenser en un an, pour stopper l’accroissement de l’effet de serre, selon actioncarbone.org.
Le poids en carbone n’est pas un indicateur parlant. A quoi cela correspond ? L’Argent, je sais de combien j’en dispose. Je sais que si je mets toutes mes Economies pour un voyage, je n’aurai plus d’argent pour changer de voiture par exemple, ou pas cette année. Je dois arbitrer. Le carbone, je sais que c’est important mais je n’ai pas de repère, encore moins de Limites visibles. Les affiches publicitaires pour les voitures m’indiquent aujourd’hui le nombre de grammes de CO2 par kilomètre parcouru. Je peux comparer, ça va peut-être devenir un critère de choix, comme la consommation.
Il aurait été bon que tous les Achats que l’on peut faire, de produits ou de services, soient assortis de la double étiquette, prix financier et prix environnemental. C’était d’ailleurs prévu parmi les engagements du Grenelle : engagement 63, donner une indication du prix carbone ou du prix écologique à travers l’étiquetage d’ici fin 2010, ou engagement 217, généraliser les informations environnementales sur les produits et services. Une transposition était prévue dans le projet de Loi Grenelle 2, mais un amendement a mis un bémol à cette belle aventure en avril 2010. L’étiquetage énergétique ou environnemental est rendu facultatif, ça se fera plus tard. Ça devrait être en 2012, après une expérimentation en 2011.
On le voit aujourd’hui, cette carence laisse les affiches sur nos murs proposer des folies environnementales. Mais profitons de ce contre Temps pour améliorer la manière de faire passer l’information. Nous l’avons vu, le nombre de kilos de carbone, dans l’absolu, n’est qu’un piètre indicateur. Il faut l’introduire dans une comptabilité personnelle, comme le prix monétaire qui vous oblige à faire des choix. Une manière de faire est de vous allouer virtuellement un budget carbone. Voilà votre quota, le nombre de kg que vous pouvez utiliser dans l’année. Après, vous faites vos choix de vie, c’est votre affaire, mais vous êtes en règle avec la planète.
Ce n’est donc pas le poids de carbone en soi qui doit vous être indiqué, mais la part de votre budget carbone. Pour reprendre les exemples exposés pour lancer cette chronique, votre aller-retour en avion à Casablanca consomme un peu Moins de la moitié de ce que vous avez la possibilité de consommer sans accentuer l’effet de serre. Pour aller de Paris à Marseille, si vous avez au départ un capital de 100 unités à dépenser dans l’année, vous en consommerez 8 si vous choisissez l’avion, 7 en voiture et 1 seule si vous prenez le train. De quoi peser sérieusement sur les décisions.
A quand les affiches qui vous feront miroiter de merveilleuses vacances décarbonées ?
Chronique mise en ligne le 29 janvier 2011
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