Prêt
Un mot aux sens multiples. Comme nom commun, Prêt représente une forme d’aide, mais comme adjectif, il devient une qualité souvent déterminante pour obtenir des aides…
Les dossiers qui sont retenus dans les grands Programmes d’intervention ne sont pas les plus importants. Du moins, ce ne sont pas les plus urgents, les plus graves, les plus Utiles qui s’imposent. Ce sont les dossiers qui sont prêts. Et ce n’est souvent pas la même chose. C’est comme dans un concours, la présentation peut primer la Qualité intrinsèque. Une opération magnifique, pleine de générosité et d’ingéniosité, pourra être devancée par une autre, plus ordinaire mais présentée avec brio.
Le grand programme aujourd’hui, à la suite du Grenelle de l’Environnement, est la réhabilitation des bâtiments. C’est une nécessité évidente au titre de la lutte contre le changement climatique. Un chantier immense, avec des acteurs hétéroclites et dispersés, atomisés pour une bonne part. Acteurs de l’Offre, avec un grand nombre d’artisans répartis en corps de métiers et peu habitués à travailler ensemble ; acteurs de la demande, où les grands groupes ou organismes publics ne représentent qu’une partie du problème, à côtés des innombrables propriétaires privés.
Le chantier, en outre, n’est pas commode à appréhender. Les situations sont très disparates, la nature des interventions, les qualités propres des constructions, leur état d’entretien, autant de variables à considérer, et les savoir faire les plus répandus ne répondent pas toujours aux besoins.
Et pourtant, l’ambition du Grenelle est immense, il faut reprendre tout le parc en 40 ans, pour ne pas rater le rendez-vous, à présent mythique, de 2050, avec un point d’Etape en 2020. Et si on peut faire plus vite, ce sera encore mieux. Fixons l’objectif à 400 000 logements par an(1), plus le logement social, plus les bâtiments publics qui devront suivre leur propre cursus, encore plus rapide, et les bâtiments tertiaires. Pour les logements privés, l’injonction est hors de question, il faut persuader les intéressés de passer aux actes, et on va les inciter de diverses manières. Ce sera par des Aides financières essentiellement. On va favoriser l’emprunt, avec des avantages sur le taux d’intérêt, allant jusqu’à zéro avec le PTZ, le prêt à taux zéro. On retrouve notre mot prêt, d’une autre manière.
Il faut effectivement de l’Argent pour rénover, surtout dans un pays comme le nôtre où il n’existe pas de Culture
de l’entretien et de l’amélioration continue de son logement. Un pays qui n’a pas, de surcroît, poussé ses exigences réglementaires du fait du faible Coût de l’énergie. Notre parc n’est pas en très bon état, il faut le reconnaître, et ça vaut pour l’énergie, vieilles chaudières et isolation défaillante, pour l’acoustique, merci pour le Bruit du voisin, l’hygiène et le confort. Même la sécurité est suivie de loin, malgré des programmes comme l’éradication du plomb et de l’amiante. L’obligation de Différents diagnostics permet de faire le point au moment des transactions, mais une part importante du parc reste avec les mêmes occupants, propriétaires attachés à leur maison, et leur amélioration peut attendre bien des années. Nous avons un sérieux Retard à rattraper, et ça représente beaucoup d’argent.
L’incitation financière d’un côté, et les pressions faites auprès des Professionnels pour qu’ils se forment aux techniques modernes et se regroupent, tels sont les instruments retenus pour s’attaquer à cet immense chantier. Un rapport récent(2) fait des recommandations pour une meilleure efficacité des aides à la performance énergétique des logements privés. Il suggère une complémentarité des aides, une combinaison assortie d’une proportionnalité entre les montants accordés et le niveau de performance atteint. Il ne s’agit ici que d’énergie, alors que les travaux importants à réaliser concernent bien sûr de nombreux autres aspects du bâti. Seule la ventilation, touchée de plein fouet par la recherche d’imperméabilité des parois, pourrait être intégrée au décompte des financements.
La seule motivation financière est bien insuffisante. Même si l’énergie coûte Cher, et malgré les aides, les Economies liée aux travaux auront bien du mal à les rembourser. Il faut alléger la charge, l’étaler dans le Temps, mais aussi actionner d’autres ressorts. La sécurité sanitaire, la fierté d’un logement coquet, la qualité des ambiances qu’il procure, le Soleil et le Calme, les facilités d’entretien, leur « modernité » sont d’autres arguments à faire valoir, sans oublier l’obligation que la Loi a ajoutée concernant l’accessibilité des handicapés. Ce n’est pas une rénovation thermique qu’il faut « vendre » aux propriétaires, mais une rénovation globale. Une rénovation qui coutera d’ailleurs moins cher que l’addition des travaux d’amélioration dans le désordre. L’effet de serre nous y oblige, tant mieux, faisons de cette Contrainte une opportunité. Sortons nos logements de la vétusté où ils se trouvent trop souvent. C’est d’ailleurs ce qui se passe dans le parc social, où la moitié de l’argent dépensé par logement pour la rénovation l’est sur d’autres volets que la thermique.
Il faut de l’argent, mais surtout du conseil. Le pauvre propriétaire isolé, qu’il soit occupant ou bailleur, est le plus souvent démuni face à ces enjeux. Par où commencer, quelles sont les bonnes techniques, comment prescrire intelligemment les travaux à faire, comment trouver les bonnes entreprises, comment vérifier la qualité de leurs prestations, autant de questions qui font hésiter au moins autant que le manque d’argent. Et ce dernier, peut-on en obtenir d’une manière ou d’une autre, quelles modalités d’accès au crédit, et de remboursement, avec la jungle financière qui en impressionne plus d’un. L’accompagnement administratif, financier et technique des propriétaires est aussi important que les aides financières directes. Une ingénierie de montage de projet, pour que les dossiers soient prêts. C’est une des clés de la réussite, comme elle l’est dans les opérations programmées d’amélioration de l’habitat (OPAH). La création d’un site Internet, proposée dans le rapport précité, est une première réponse, mais rien ne remplace le contact humain, en direct. Il faut avant tout rassurer.
La République a eu ses « hussards », la rénovation des logements cherche les siens. Toutes les professions du bâtiment, de maîtrise d’œuvre notamment, sont concernées pour créer cette assistance indispensable pour valoriser l’ensemble des instruments financiers (y compris les certificats d’économies d’énergie et diverses aides à l’insonorisation, par exemple), comme pour bénéficier des avancées techniques les plus pertinentes. Pour que les propriétaires soient prêts à se lancer dans l’aventure.
1 - Article 5 de la loi Grenelle 1, objectif à compter de 2013
2 - POUR UNE MEILLEURE EFFICACITE DES AIDES A LA PERFORMANCE ENERGETIQUE DES LOGEMENTS PRIVES
Rapport présenté par Philippe Pelletier, Avocat, Président du comité stratégique du Plan Bâtiment Grenelle, 15 avril 2011
Chronique mise en ligne le 15 janvier 2011
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