Potager
la chimie nous aide à mettre de l'ordre dans notre potager. Fini les mauvaises herbes, et les parasites de nos chers légumes. Mais les pesticides peuvent être dangereux pour l'homme et de nombreuses espèces utiles. Il va falloir apprendre à s'en passer.
C’est sans doute une coïncidence : au moment précis où la preuve des méfaits de la chlordécone (un pesticide employé sur les bananiers) est publiée, le ministère de l’écologie lance une grande campagne sur les produits employés dans les Jardins potagers.
Le jardinage et le cancer de la prostate ne sont pas liés, mais la prudence dans l’usage de la chimie est de mise dans les grandes exploitations comme pour les lopins de terre.
C’est un des 268 engagements du Grenelle que de diviser par 2 en 10 ans la consommation de produits phytosanitaires. Nous sommes aujourd’hui champions d’Europe, avec une consommation de 78000 tonnes de pesticides, dont l’essentiel est utilisé par les agriculteurs. Un grand programme animé par le ministère de l’Agriculture, le plan éco phyto 2018 a été lancé en 2008 dans la foulée du Grenelle.
Notons aussi que les Villes sont concernées. Les parcs et jardins, les cimetières, les pieds des arbres et autres sols non revêtus font l’objet de traitements divers. Des efforts sont entrepris pour réduire le volume des produits utilisés, et même s’en passer grâce à une autre conception et un autre aménagement de ces espaces. Plusieurs villes comme Nantes, Versailles, Strasbourg, Paris, Rennes et bien d’autres, se sont lancées dans des démarches zéro phyto. Une plate forme d’expérimentation et d’échanges est créée, Plantes et Cités(1). Le mouvement est lancé.
Revenons à nos potagers. Un tiers des français jardinent, et leurs jardins représentent une surface d’un million d’hectares, soit autant que les réserves naturelles. Les 5000 tonnes de pesticides utilisées par les jardiniers amateurs ne pèsent pas bien lourd dans l’ensemble, mais elles sont utilisées dans des lieux sensibles, près des habitations. L’enjeu en vaut donc la peine, pour réduire les pollutions et pour diffuser une culture environnementale auprès du public. Le plan éco phyto 2018 devait être complété pour les amateurs dans leurs potagers. C’est fait sous la forme d’une campagne intitulée : les pesticides, apprenons à nous en passer(2).
Pour s’en passer, cela commence dès la conception de son jardin et le choix des cultures. Le vieux principe de varier les légumes qui se succèdent sur vos planches, année après année, est rappelé. Un bon compost pour enrichir la terre, et des traitements naturels : Les vieilles recettes sont toujours bonnes, il faut les rappeler et les mettre au goût du jour.
Le plus difficile est sans doute la petite révolution culturelle que ces pratiques demandent. Il va falloir abandonner la culture je ne veux voir qu'une seule tête au profit de la culture du faire avec. Pour favoriser un meilleur enracinement du gazon, on va le couper plus haut. Adieu le gazon anglais tondu ras. Cela permet d’économiser de l’eau et des herbicides, mais la physionomie du jardin va un peu changer. C’est la même évolution dans les villes, où les herbes folles ont fait leur apparition. La nature sauvage reprend ses droits, mais pour certains, ça fait désordre, ou même sale. Les modèles du jardin idéal vont prendre un coup de vieux.
Pour abandonner ou réduire l’usage des pesticides, il faut des alliés. Ce sont les prédateurs des parasites que l’on éliminait avant avec des produits. Il faut parfois les séduire, pour qu’ils viennent s’installer chez vous. Vous devrez les attirer en créant des milieux favorables, comme des haies ou des marres, ou encore des nichoirs pour les oiseaux. Tout compte fait, ça diversifie votre jardin, c’est plutôt sympa, mais ça oblige à devenir savant. Ce sont des mécanismes biologiques que l’on active ou que l’on favorise. Il faut apprendre à les connaître pour les maitriser et en faire bon usage. Rassurez-vous, ils sont souvent très simples, vous les trouverez dans les nombreux magazines de jardinage. Ils demandent juste un peu d’attention, de sens de l’observation, voire de curiosité. C’est une école de la nature. Votre potager est un petit biotope, que vous faites vivre et dont vous extrayez les fruits. Abandonnez toute idée de le contraindre, de le forcer et de le faire entrer dans un moule. Il vous faudrait pour cela rendre votre culture artificielle, et faire usage de nombreux produits, pour apporter à la plante les aliments dont elle a besoin, et tuer toute autre forme de vie. Au contraire, laissez faire la nature, en favorisant les penchants qui vous intéressent, en pilotant finement un foisonnement qui peut vous paraître du désordre, mais qui est l’expression d’une richesse extraordinaire.
De l'Intelligence et de la sensibilité, au lieu de pesticides. Toute une culture qui ne s’improvise pas, mais qui s’approfondit à la pratique. Les échanges que tout jardinier entretien avec ses voisins, et parfois même ses communautés d’internautes, jouent un rôle important dans cette « acculturation ». Réduire l’usage des pesticides dans son potager, c’est bon pour l’environnement comme pour votre porte-monnaie. C’est bon pour votre santé, physique et mentale. Et c’est bon pour la vie sociale. Y a pas à hésiter !
1 - www.plante-et-cite.fr
2 - www.jardiner-autrement.gouv.fr
Chronique publiée dans le Moniblog le 27 juin 2010
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