
Vinaigre
On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, selon le dicton populaire. Va-ton le faire mentir avec le climat ? Pourra-t-on mobiliser les énergies avec le vinaigre de l’alerte et de la culpabilité ?
On ne dira jamais assez de bien du vinaigre, vinaigre ménager, vinaigre de cidre et toutes les formes de vinaigre, bon pour la santé et l’hygiène. Vive le vinaigre ! Il a toutefois un défaut, que la sagesse populaire a bien perçu : On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre.
Transposons ce dicton dans notre monde en danger de réchauffement, de surexploitation, de surpeuplement, d’appauvrissement et de submersion de matières plastiques. Comment inverser la tendance pour revenir à la sagesse et construire un futur durable ?
La méthode principale employée jusqu’à présent a été l’alerte. 1972, c’est le Printemps silencieux de Rachel Carson, 20 ans plus tard, c’est le rapport Meadows, 2002, « La maison brûle », etc. Ecrivains, scientifiques, ONG et politiques ont donné dans ce registre. Le résultat n’est pas probant, il faut bien l’avouer. Le goût du vinaigre de l’alerte et de la catastrophe annoncée n’a pas attiré beaucoup de mouches.
Face à ce constat, deux attitudes possibles, comme en médecine, quand un médicament ne donne pas les effets escomptés. Soit on persévère, en augmentant la dose, soit on adopte une autre thérapie. Dans notre domaine, il semble bien que ce soit la première option qui domine largement, avec en prime une approche moralisatrice.
Bien sûr, le problème s’est aggravé, et on peut espérer que l’alerte sera mieux entendue à la suite des cyclones et des canicules à répétition. Il est quand même permis de s’interroger sur l’efficacité de l’alerte permanente. Elle occupe tout le champ médiatique et ne laisse guère de place à d’autres levier du changement. Pire, elle les rend inaudibles. Comment donner du développement durable une image attractive, sur fond de décor de catastrophe immanente et d’accusation de crime contre l’humanité ? Si l’alerte ne donne pas de résultat, est-ce qu’elle ne risque pas, en montant régulièrement d’un cran, de provoquer du découragement, de détourner d’éventuelles bonnes volontés, et de retarder le changement désiré ? La vigueur de l’engagement ne suffit pas pour obtenir des progrès. Il y a des stratégies contreproductives. Rappelez-vous la COP 15 à Copenhague, en 2009. Les ONG avaient mobilisé des foules pour obtenir un accord contraignant, alors qu’elles savaient que deux pays au moins, et pas les moindres, les USA et la Chine, ne pouvaient que s’y opposer. Résultat ? Un sentiment d’échec, un essoufflement, et un reflux de la vague militante. Les lobbyistes de l’ancien monde ne pouvaient pas rêver mieux.
Aujourd’hui, interrogeons-nous sur la stratégie de culpabilisation et d’alarme maximale incarnée par Greta Thunberg. Ne va-t-on pas vers un nouvel échec, comme toutes les manœuvres d’alerte qui l’ont précédée ?
Une autre thérapie consiste à donner envie du changement. Changeons non pas pour échapper au malheur et par crainte du futur, mais pour découvrir un nouveau monde, de nouveaux modes de vie pleins de promesses. Un politique POUR, au lieu d’une politique CONTRE. Ce sont d’autres moteurs qui sont alors activés, et d’autres codes de communication. L’action pour le développement durable en général et notamment le respect des grands équilibres, pour le climat, les océans, la biodiversité, les cultures locales, etc. comporte de nombreuses opportunités et ouvre des perspectives d’avenir pour l’humanité et chacun d’entre nous. Une approche rarement développée et peu médiatisée. Le vinaigre occupe toute la place, et n’en laisse guère pour les fleurs sauvages et leurs senteurs.
N’abandonnons pas l’alerte, elle est évidemment utile et nous donne des repères. Mais ne lui laissons pas occuper tout l’espace. L’important est de rendre attractif le nécessaire changement de mode de vie. Deux fois plus de bien-être en consommant deux fois moins de ressources, nous dit un autre rapport du Club de Rome (1) . Prenons un exemple pour illustrer cette voie. La lutte contre la précarité énergétique permet d’améliorer l’état de santé des populations les plus sensibles. Un double dividende, pour la planète et pour les humains. Et en prime, ça fait gagner de l’argent : Les économies en dépenses de santé sont supérieures au coût de la rénovation des bâtiments. Le changement, c’est que du bonheur !
C’est la recherche de ce « plus de bien-être » qui doit devenir le moteur de la transition. Un bien-être qui sera évidemment différent de celui d’aujourd’hui, où la qualité de vie sera plus liée à la richesse des relations humaines qu’à l’accumulation de biens matériels. C’est quand même mieux que le vinaigre !
On ne dira jamais assez de bien du vinaigre, vinaigre ménager, vinaigre de cidre et toutes les formes de vinaigre, bon pour la santé et l’hygiène. Vive le vinaigre ! Il a toutefois un défaut, que la sagesse populaire a bien perçu : On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre.
Transposons ce dicton dans notre monde en danger de réchauffement, de surexploitation, de surpeuplement, d’appauvrissement et de submersion de matières plastiques. Comment inverser la tendance pour revenir à la sagesse et construire un futur durable ?
La méthode principale employée jusqu’à présent a été l’alerte. 1972, c’est le Printemps silencieux de Rachel Carson, 20 ans plus tard, c’est le rapport Meadows, 2002, « La maison brûle », etc. Ecrivains, scientifiques, ONG et politiques ont donné dans ce registre. Le résultat n’est pas probant, il faut bien l’avouer. Le goût du vinaigre de l’alerte et de la catastrophe annoncée n’a pas attiré beaucoup de mouches.
Face à ce constat, deux attitudes possibles, comme en médecine, quand un médicament ne donne pas les effets escomptés. Soit on persévère, en augmentant la dose, soit on adopte une autre thérapie. Dans notre domaine, il semble bien que ce soit la première option qui domine largement, avec en prime une approche moralisatrice.
Bien sûr, le problème s’est aggravé, et on peut espérer que l’alerte sera mieux entendue à la suite des cyclones et des canicules à répétition. Il est quand même permis de s’interroger sur l’efficacité de l’alerte permanente. Elle occupe tout le champ médiatique et ne laisse guère de place à d’autres levier du changement. Pire, elle les rend inaudibles. Comment donner du développement durable une image attractive, sur fond de décor de catastrophe immanente et d’accusation de crime contre l’humanité ? Si l’alerte ne donne pas de résultat, est-ce qu’elle ne risque pas, en montant régulièrement d’un cran, de provoquer du découragement, de détourner d’éventuelles bonnes volontés, et de retarder le changement désiré ? La vigueur de l’engagement ne suffit pas pour obtenir des progrès. Il y a des stratégies contreproductives. Rappelez-vous la COP 15 à Copenhague, en 2009. Les ONG avaient mobilisé des foules pour obtenir un accord contraignant, alors qu’elles savaient que deux pays au moins, et pas les moindres, les USA et la Chine, ne pouvaient que s’y opposer. Résultat ? Un sentiment d’échec, un essoufflement, et un reflux de la vague militante. Les lobbyistes de l’ancien monde ne pouvaient pas rêver mieux.
Aujourd’hui, interrogeons-nous sur la stratégie de culpabilisation et d’alarme maximale incarnée par Greta Thunberg. Ne va-t-on pas vers un nouvel échec, comme toutes les manœuvres d’alerte qui l’ont précédée ?
Une autre thérapie consiste à donner envie du changement. Changeons non pas pour échapper au malheur et par crainte du futur, mais pour découvrir un nouveau monde, de nouveaux modes de vie pleins de promesses. Un politique POUR, au lieu d’une politique CONTRE. Ce sont d’autres moteurs qui sont alors activés, et d’autres codes de communication. L’action pour le développement durable en général et notamment le respect des grands équilibres, pour le climat, les océans, la biodiversité, les cultures locales, etc. comporte de nombreuses opportunités et ouvre des perspectives d’avenir pour l’humanité et chacun d’entre nous. Une approche rarement développée et peu médiatisée. Le vinaigre occupe toute la place, et n’en laisse guère pour les fleurs sauvages et leurs senteurs.
N’abandonnons pas l’alerte, elle est évidemment utile et nous donne des repères. Mais ne lui laissons pas occuper tout l’espace. L’important est de rendre attractif le nécessaire changement de mode de vie. Deux fois plus de bien-être en consommant deux fois moins de ressources, nous dit un autre rapport du Club de Rome (1) . Prenons un exemple pour illustrer cette voie. La lutte contre la précarité énergétique permet d’améliorer l’état de santé des populations les plus sensibles. Un double dividende, pour la planète et pour les humains. Et en prime, ça fait gagner de l’argent : Les économies en dépenses de santé sont supérieures au coût de la rénovation des bâtiments. Le changement, c’est que du bonheur !
C’est la recherche de ce « plus de bien-être » qui doit devenir le moteur de la transition. Un bien-être qui sera évidemment différent de celui d’aujourd’hui, où la qualité de vie sera plus liée à la richesse des relations humaines qu’à l’accumulation de biens matériels. C’est quand même mieux que le vinaigre !
1 - Facteur 4, Rapport au Club de Rome daté de 1997, d’Ernst U. Von Weizsäcker, Amory B. Lovins, et L. Hunter Lovins, Terre Vivante pour l’édition française.
Photo : Gabriel Manlake -Unsplash
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