Rêve
Le développement durable n’est pas un rêve, mais une dynamique, qui nous porte vers des états et une société dont nous n’osons à peine rêver. Mandela l’a fait, pourquoi pas d’autres ?
La tentation de diviser est omniprésente. Nous sommes différents, vivons séparés. Une distance pour éviter les conflits, avec un peu de libre échange pour que les affaires prospèrent, et le tour est joué.
Deux religions, deux cultures, deux origines, ou plus, alors faisons plusieurs états. Dans un autre ordre d’idées, cyclistes et automobilistes cohabitent difficilement, faisons des voies séparées. Chacun chez soi, bien protégé, le contraire de la civilisation. Celle-ci n’est-elle pas la recherche de modes de vie où tout le monde se sent à l’aise, où chacun bénéficie de la différence des autres ?
Madiba s’est lancé dans cette bataille, que chacun croyait perdue d’avance. Sortir de l’apartheid sans guerre civile, sans le rejet de la communauté blanche, constitutive de l’Afrique du Sud comme le sont les noirs, avec les strates que l’histoire de ce pays a cumulées sur son sol. Malgré cette histoire, justement, malgré les différences d’origines, de culture, de niveaux de vie, de moyens financiers, etc., et la violence qui est toujours présente, comment faire une seule nation ? Une ambition rare dans ces temps où l’on préfère se diviser. L’Inde des anglais s’est divisée en 2, puis 3 pays, sans parler du Cachemire qui fait toujours l’objet d’affrontements. Les communautés éclatées entre plusieurs Etats, comme les Kurdes, les Arméniens ou de nombreuses ethnies africaines, ont du mal à vivre cette situation de division, et constituent des minorités qui éprouvent toutes les difficultés du monde à préserver leur identité, et même parfois leur intégrité physique. Le « foyer national juif » se constitue dans la douleur, par rejet de l’autre, sans que l’on puisse entrevoir d’issue autre que la séparation physique de deux communautés, bien loin de l’esprit de communion qui devrait présider aux destinées des peuples enracinés dans la même terre. Un seul pays pour plusieurs communautés, pour plusieurs religions, où chacun se sente à l’aise avec ses conviction et dans ses rapports avec les autres, n’est-ce pas cela la civilisation, la marche en avant rêvée de l’humanité ?
Un même pays pour plusieurs communautés, une seule planète pour tous les êtres humains. Au-delà de l’horrible phrase selon laquelle nous sommes « condamnés » à vivre ensemble, comment surmonter nos divergences sur l’avenir de la planète, comment assurer à chacun l’accès à ses ressources, comment faire que lesdites ressources soient valorisées au mieux ?
La question de l’effet de serre est très instructive à cet égard, comme celle de tous les « biens communs ». Ceux-ci constituent notre patrimoine, il est partagé mais souvent valorisé par les uns et par les autres. Le climat et de nombreuses ressources naturelles comme la biodiversité ou la richesse des océans n’appartiennent pas à telle ou telle puissance, politique ou économique, mais le régime de la concurrence règne. Nous sommes loin du rêve, et chacun tente d’accroître sa part du gâteau, sa part du marché pour reprendre la terminologie officielle. Les gisements de ressources sont convoités et appropriés, même le vivant entre dans la sphère marchande, protégé par des brevets.
Les enjeux liés à l’énergie sont énormes, le monde moderne s’est construit sur les bases d’une ressource inépuisable et pas cher. Nous n’avons pas encore tiré les conséquences de la « finitude » du monde, et abandonné le principe de l’accaparation, qui pouvait être légitime dans une planète sans limites. Si les ressources sont en quantité infinie, le mérite revient à ceux qui savent les trouver, et que le meilleur gagne. Cette course conduit inévitablement au « toujours plus », chacun cherchant sa prospérité dans une augmentation de sa production, donc des prélèvements qu’il opère. Une logique de concurrence qui mène la planète à l’asphyxie ou à l’épuisement.
Le rêve aujourd’hui, si l’on veut progresser sur la réduction des émissions des gaz à effet de serre, consiste à raisonner différemment, et à réserver la concurrence à l’usage des ressources, non leur prélèvement. Qui sera la plus efficace, qui offrira le maximum de services avec le minimum d’empreints à la planète ? C’est bien là que l’émulation a un sens, que la concurrence profite à toute la collectivité.
Une seule planète, beaucoup de communautés, avec des modes de vie et des cultures différentes. Comment leur faire comprendre qu’elles ont les même intérêts, au-delà de leurs différences, et comment, ensuite, les conduire à une gestion équitable des « biens communs » ? L’esprit de Mandela devrait nous guider dans ces réflexions, pour une planète « Arc-en-ciel », pour faire du rêve une réalité.
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