Appel
Ce blog est conçu à partir des mots de l’actualité ou de la vie quotidienne. Le 18 juin, un mot s’impose, appel. Comment faire rebondir « Appel » dans l’univers du développement durable ?
Commençons par l’appel du 18 juin. Un appel à ne pas se résigner, à ne pas accepter l’inacceptable.
Même quand tout va mal, ne pas désespérer, et s’organiser. Ce n’est pas le cas de la France ou de la démocratie qui est en cause ici, mais celui de la planète, et du sort de chacun de ses habitants : bientôt 9 milliards, alors que nous ne parvenons pas aujourd’hui à nourrir tout le monde correctement. Le développement durable est un appel à relever un défi, et à mobiliser toutes les forces disponibles pour y parvenir.
Nous avons besoin pour cela d’un véritable appel d’air. L’époque a changé, et nous fonctionnons encore comme avant, du temps où nous pensions que le monde n’avait pas de limites. Notre pensée, collective et personnelle dans la plupart des cas, est encombrée de vieux schémas. Rappelons nous Einstein : « on ne résout pas les problèmes avec l’état d’esprit qui les a provoqués ». Un renouveau de la pensée s’impose, délivrée, libérée, pour imaginer de nouveaux futurs. Ce renouveau a commencé, on l’observe ici et là, mais il se heurte à une formidable résistance des intérêts en place et des institutions. Un appel d’air est nécessaire pour trouver les nouvelles formes d’état d’esprit qui permettront la mise en place d’un monde adapté à sa finitude.
Nous pourrions lancer un appel d’offres pour le futur. Quels projets dignes de ce nom pour la diversité des sociétés qui compose la France, et la planète ? « Un autre monde est possible », surement, mais comment le construire ? Il doit d’ailleurs ne pas en avoir qu’un seul, mais une quantité, à faire vivre en harmonie. La diversité des cultures et des modes de vie permet d’alléger la pression sur les ressources que la Terre nous offre, en évitant que les besoins ne se concentrent sur quelques unes d’entre elles, qui seraient alors vite consommées ou détruites. Comment proposer à nos contemporains d’autres modèles de vie, toujours attractifs et fondés sur la qualité de la vie, mais dépourvus des germes de « non durabilité » : les comportements et les consommations dont on sait que leur développement mène à l’impasse, compte-tenu des ressources disponibles. Il nous faut aller vers des civilisations créatrices d’émotions, qui constituent la vraie richesse de nos vies, et ne consomment guère de ressources autres qu’humaines.
Le développement durable est affaire de créateurs et d’entrepreneurs, au sens de l’esprit d’entreprise. Plan-plan s’abstenir. Imaginer d’autres futurs et engager leur réalisation, valorisant la compétence et le génie des humains, ressources largement sous exploitée aujourd’hui. Un appel à la mobilisation générale des talents, des sensibilités, pour imaginer et rendre crédible ces futurs, incorporant bien sûr les formidables innovations technologiques qui nous permettent de se dégager de contraintes matérielles. L’intendance n’est pas l’essentiel, mais elle le devient si elle n’est pas assurée. La peur de manquer est lourde de conséquences : le repli, l’égoïsme, l’accaparement des ressources et leur stérilisation. Elle bloque l’esprit d’aventure et de découverte de nouveaux modèles. Le développement durable est un appel à la découverte, à l’exploration des possibles, c’est un appel du grand large. Celui-ci n’est plus seulement géographique, il est avant tout d’ordre culturel.
Des produits d’appel ne sont pas superflus dans cette perspective. Il faut donner à voir, à toucher du doigt ce que ces futurs peuvent être, de manière à entraîner le plus grand nombre dans cette recherche collective. Il y a eu, et il y a encore de grandes utopies, mais préférons les avancées concrètes, comme l’habitat participatif ou la lenteur (slow food, villes lentes, etc.), ou encore l’économie dite de fonctionnalité, où la priorité à l’usage sur la propriété ouvre de nouveaux horizons. Les sociétés humaines savent être créatives, si les institutions et les intérêts en place ne les inhibent pas.
Le développement durable est un appel du pied à tous ceux qui trouvent formidable d’être amenés à imaginer un monde nouveau, au lieu de prolonger celui de nos parents. C’est une ère de liberté qui s’ouvre, il s’agit d’ouvrir le champ du possible, avec un droit d’inventaire sur l’héritage que nous avons reçu, et qui contient des pièges et des fausses piste de progrès, à côté de joyaux inestimables. Rester dans les rails posés hier et même avant, en proclamant « on ne peut pas faite autrement », comme on l’entend si souvent, nous conduira à des crises redoutables, et à des déchirements violents. Evitons-les en devançant l’appel.
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