Neutralité
Pour limiter le réchauffement climatique, une seule solution : la neutralité carbone. C’est l’objectif impératif pour ne pas dépasser les deux degrés fatidiques de hausse des températures, ou encore mieux 1,5 degrés. Comment faire pour y parvenir ?
Neutralité carbone, bien sûr, en ces temps où l’effet de serre devient l’ennemi numéro 1. Nous sommes addictes au carbone depuis des millénaires. Pas de problème tant que ledit carbone était celui récolté à la surface de la planète, dans une forme de cycle régénérateur, mais les choses ont changé quand l’humanité a extrait le charbon, puis le pétrole et le gaz des entrailles de la terre. Nous remettons en circulation dans l’atmosphère des quantités de carbone emmagasinées au cours de centaines de millénaires, et ça n’est pas du tout la même chose.
La France, à la suite de la COP21 et des accords de Paris, s’est donné pour objectif la neutralité carbone en 2050, avec une stratégie bas carbone et des programmations pluriannuelles de l’énergie. Au menu, des économies d’énergie et le recours aux énergies décarbonées, plus des puits de carbone pour en absorber le maximum possible sur notre territoire. Certains regrettent un manque d’ambition, mais il faut reconnaître que la tâche est difficile, comme tout sevrage. D’autant que les indicateurs sont trompeurs. Nos émissions de gaz à effet de serre sont en effet en baisse, mais pas notre « empreinte carbone », qui ne cesse de croître malgré une inflexion au début de la décennie 2010.
Il ne faut pas se limiter au carbone émis sur notre territoire. Les délocalisations seraient alors une solution à ce problème, mais l’effet de serre ne connait pas de frontières. Il faut intégrer le carbone émis du fait de notre mode de vie, de nos consommations, quel que soit le lieu d’où il a été émis dans l’atmosphère. La production d’un ordinateur, par exemple, avec son écran, représente environ un dixième de notre empreinte moyenne annuelle (1 tonne pour une empreinte de l’ordre de 11 tonnes de CO2), et elle est comptabilisée quelque part en Asie. Sa consommation, affectée au lieu d’usage, est beaucoup plus faible, sans parler des data centers qui sont un peu partout dans le monde et qui consomment également. Notre empreinte carbone limitée aux émissions sur notre territoire, ne donne qu’une idée partielle de notre impact sur l’effet de serre. Globalement, il faut ajouter un tiers à nos émissions nationales, après avoir déduit le carbone exporté, celui des produits fabriqués en France pour un usage ailleurs. Chiffres provisoires et à revoir régulièrement, car nous assistons à une baisse continue de nos émissions et une hausse en parallèle du carbone importé.
La neutralité carbone se recherche sur deux tableaux à la fois, côté production et côté consommation. Pour la production, l’association entreprises pour l’environnement a décrit le chemin vers la neutralité, et assure qu’il est possible de l’atteindre en 2050 (Voir ZEN). Pour la consommation, ce sera plus difficile, car il s’agit d’inverser une courbe qui n’arrête pas de monter. Les gros postes de consommation d’énergie sont les transports et le logement, et juste derrière l’alimentation. C’est là qu’il faut faire des efforts d’imagination pour trouver de nouveaux modes de vie, toujours agréables et plus agréables si possibles, tout en consommant moins d’énergie fossile.
Deux leviers pour y parvenir, l’un technologique, et l’autre comportemental, les deux étant étroitement liés. Des bâtiments très économes, voire à énergie positive, construits avec des matériaux « bas carbone », des voitures électriques alimentées au solaire, des techniques agricoles sans intrants ni matériels lourds, pour ne prendre que trois exemples pour le volet technologique. Mais ça ne suffit évidemment pas. Nous devons aussi mieux utiliser ces techniques, éviter des déplacements grâce aux téléconférences et au travail à distance, privilégier l’usage de matériels ou de voitures plutôt que d’en être propriétaire, choisir les modes doux de déplacement et adopter l’écoconduite si la voiture est indispensable, manger plus de légumineuses et moins de viande, etc.
C’est donc un mix qu’il nous faut réussir, ce qui n’est pas gagné car souvent la technique a entraîné des fuites en avant. La vitesse en est une bonne illustration. Toujours plus vite, la technique le permet, et ça nous donne du plaisir. Nous sommes drogués par la vitesse, mais elle coûte cher, en argent comme en énergie. Trouver du plaisir dans la lenteur, c’est une autre culture qu’il faut développer.
Pas de neutralité carbone sans changer de mode de vie, il faut donc en trouver d’autres, qui soient à la fois attractifs et économes en ressources. Les progrès de la science et des techniques, avec les investissements correspondants, doivent être orientés résolument dans cette direction.
Photo : Ksenia Makagonova/Unsplash
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