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Culture, valeurs

Stéréotype

stereotype taichi nakamura bvTyyEagEpY unsplashPour que la perspective d’un nouveau mode de vie soit acceptée, il faut qu’elle corresponde à l’imaginaire de chacun d’entre nous, un imaginaire pollué par de nombreux stéréotypes, piliers du monde d’avant. Comment bousculer cet univers mental ?

Les stéréotypes nous gouvernent. Nous ne nous en rendons pas compte, mais les « représentations sociales » dominantes dans nos milieux orientent nos styles de vie, guident nos achats, et façonnent nos modes de penser. Pour les sociologues et les spécialistes des sciences du comportement une « représentation sociale » est une notion fondamentale de la sociologie. Il s’agit de réalités mentales, « des cadres d’interprétation du réel, de repérage pour l’action, des systèmes d’accueil des réalités nouvelles » (Jodelet, 2012) qui agissent comme des filtres organisateurs de la perception et orientent (sans déterminer) les conduites, mais aussi la communication et les pratiques (1) ». Les changements de comportement et de mode de vie, nécessaires pour relever les défis que nous rencontrons chaque jour (climat, biodiversité, océans, etc.) ne pourront jamais se faire sans, en amont, une modification de ces représentations sociales, les stéréotypes.


Ceux-ci nous collent à la peau, ils se sont forgés avec le temps et souvent des actions de communication de longue haleine. En prendre conscience, s’en libérer et s’ouvrir à d’autres références, conformes à la réalité plutôt qu’à un imaginaire, est un préalable à tout effort de transformation. A défaut, les messages d’alerte et la promotion de nouvelles manières de vivre resteront lettre morte. Un gâchis, un échec pour la planète comme pour les humains, et une immense frustration. Il n’est pas impossible de se débarrasser des stéréotypes, mais ça prend du temps et il faut une action continue pour y parvenir. L’exemple du tabac est une bonne illustration de ce processus. Associé à la virilité avec le fameux cow-boy, puis à a libération des femmes, le tabac avait le vent en poupe, malgré les ravages sanitaires qu’il provoque. Le tabac reste dans nos mœurs, mais son image a bien changé, à la suite d’interdictions (de fumer dans certains lieux, de montrer des fumeurs dans les médias), d’étiquetage, de hausse des prix, de messages d’alerte.
Cette question des représentations sociales se pose à toutes les échelles. Ici ce sera tout simplement la concurrence avec son voisin, à celui qui aura la plus belle voiture, là ce sera à l’échelle mondiale, les modes de vie des pays réputés les plus avancés s’imposant aux élites d’autres pays, et transformant insidieusement leurs cultures. Le fameux American way of life est parti à la conquête du monde au lendemain de la seconde guerre mondiale, et exerce toujours une grande influence.
Comment faire évoluer les stéréotypes pour permettre la transition vers un monde durable ? Comment parvenir à ce que les modèles que chacun a en tête, consciemment ou non, pousse à l’abandon des pratiques anciennes au profit de celles « de demain » ?
Le discours politique pourra s’y attacher, mais nous savons que sa crédibilité est souvent contestée. Il y a le recours à des vedettes, auxquelles nous nous identifions aisément, vedettes de cinéma, de la chanson, du sport, ou de tout autre domaine populaire, qui sont porteurs des valeurs de notre temps et peuvent faire des disciples. Le champ culturel sera mis à contribution, mais ça ne suffira pas. Et il y a les messages commerciaux, la publicité, qui envahit nos vies, et nous propose des produits et des services à consommer sans modération le plus souvent. La puissance de cette communication est telle que la publicité est devenue un vecteur incontournable à mobiliser pour proposer de nouveaux imaginaires. C’est un mix de tous ces moyens qui permettront d’obtenir le résultat recherché.
Mobiliser la publicité semble une gageure, elle dont le but est de nous faire consommer toujours plus. D’autant que les messages doivent permettre à chacun de s’y retrouver, avec par conséquent les références d’hier, que nous cherchons justement à éliminer. Elle doit malgré tout accompagner le changement, et porter les stratégies des entreprises qui veulent (ou doivent) y intégrer les contraintes du changement climatique. L’adaptation au nouveau contexte est la condition de leur survie à terme, et leur communication doit préparer leurs clients potentiels à s’intéresser aux produits de demain. Ajoutons que de nombreux éléments de contexte des messages publicitaires contribuent à créer un paysage, une culture, et dessinent un mode de vie. Là sont les leviers du changement, à la portée des créatifs des agences de publicité et de communication.
Entreprises pour l’Environnement a conçu à leur intention un guide opérationnel pour s’attaquer aux stéréotypes du monde d’avant. 10 stéréotypes y sont analysés, pour proposer des manières de les éviter ou d’en réduire la portée, et pour suggérer de mettre en avant d’autres imaginaires, favorables au changement. Nous souhaitons plein succès à cette initiative, en espérant que les « communicants » parviendront en outre à « vendre » la transition écologique à leurs clients.

1 Stéphane La Branche, sociologue, coordonnateur scientifique du GIECo-IPBC, dans le guide d’entreprises pour l’environnement (EpE) Représentations des modes de vie et transition écologique (novembre 2021)

Photo : Taichi Nakamura / unsplash

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