Restau
L’alimentation a ceci departiculier, c’est que l’on ne peut augmenter indéfiniment sa consommation. On peut payer plus cher, y associer du service et des exigences de qualité, mais il est plutôt mauvais pour la santé de manger trop, et ça se sait. On ne forge pas son image personnelle sur le “manger plus”, mais sur le “manger mieux”. Voilà donc une ouverture intéressante pour le développement durable, où l’on cherche à substituer une croissance qualitative à la croissance actuelle, essentiellement quantitative.
Le restaurant offre une bonne ilustration de la dématérialisation de l’économie. Aller au restaurant, ce n’est pas consommer plus, mais c’est ajouter du service aux biens matériels que l’on consomme : sélection des marchandises, et achat groupé, cuisine, service à table, vaisselle, il n’y a que du plus en terme de travail par rapport à ce que serait la confection d’un repas chez soi. Le prix payé en plus constitue bien une “croissance” en termes de valeur ajoutée et de produit intérieur brut, mais pas une “croissance” en termes de prélèvements sur les resssources de la planète. On peut même espérer que la croissance en valeur ajoutée entraîne dans ce cas précis une baisse des prélèvements. La cuisine collective pourrait aisément êtret plus efficace en termes de consommation d’énergie que la cuisine individuelle, et la consommation d’eau pour la vaisselle est réduite du fait de l’efficacité des matériels professionnels par rapport à l’équipement des ménages. Il reste des points à examiner de près, comme le lavage du linge de table, plus fréquent et plus exigeant pour un restaurant que pour un particulier, et la terrible question des emballages de portions individuelles : faut-il vraiment, au nom de l’hygiène, que chaque portion de beurre soit emballée séparémment, de même que la confiture et les morceaux de sucre ?
Le terme de restaurant fait référence à la sortie entre amis, c’est aussi le déjeuner pris dans l’entreprise ou l’école. Le bilan énergétique, en eau et consommations matérielles, est dans le cas le plus fréquent largement favorable au restaurant. La démarche “Haute qualité environnementale” est d’ailleurs reprise par les professionnels de la restauration collective, de manière à optimiser les consommations et la gestion des déchets, et offrir aux usagers comme au personnel conditions de vie aussi saines et agréables que possibles.
Un autre paramètre s’impose dans cette analyse comparée des modes de prise de repas : Qu’en est-il de la qualité des aliments, et de la filière de production en amont ?
On ouvre ainsi le dossier des exigences sur la qualité des produits. L’achat direct par le consommateur, offre a priori des garanties, du fait des labels et autres certificats, mais parfois au détriment des prix. L’achat par les professionnels présente l’inconvénient d’un intermédiaire si celui-ci n’apporte pas de réel service spécifique. S’il fait bien son métier, il doit permettre de réguler les chaînes, du fait des volumes concernés. C’est particulièrement vrai pour la restauration collective, comme les cantines scolaires. L’affichage d’exigences qualitatives dans les cahiers des charges constitue une garantie pour des producteurs et les filières d’approvisionnement, qui peuvent ainsi investir dans de nouvelles pratiques culturales et de conditionnement des marchandises. Un puissant facteur d’accélération peut être ainsi mis en marche au profit d’une agriculture “durable”.
Quelle que soit la formule retenue, la marche vers la qualité demande des contrôles, et une traçabilité. C’est un point sensible, et on voit pour certains produits la difficulté à certifier leur origine et les conditions de production, de transformation. Les débats sont houleux au sein des organismes de commerce équitable notamment. La qualité des produits pour le consommateur ne doit faire oublier les autres paramètres du bilan environnemental et social, comme le conditionnement, l’emballage, et le transport. La recherche de la qualité doit être globale, et l’intérêt des démarches collectives de reconnaissance de cette qualité est bien d’assurer cette vue d’ensemble, intégrant les principaux paramètres.
Passer de l’économie domestique au secteur marchand ou collectif introduit souvent une certaine inquiétude. Fini les bon petits plats mijotés avec les produits du marché, c’est l’heure de la consommatoin de masse ! Une telle vision des choses serait bien imparfaite, car outre le fait que chacun reste libre de se confectionner son miroton favori, c’est bien sur l’évolution d’ensemble de la qualité des produits qu’il faut faire l’effort, et le poids des acheteurs collectifs est à ce titre déterminant. Et à tout prendre, pour le développement durable, mieux vaut dépenser son argent pour une bonne bouffe au restau du coin, avec la chaîne d’emplois que ça représente, que de sauter dans un avion pour un weekend à Marrakech, avec le bilan énergétique que ça entraîne !
Chronique publiée le 11 août 2006
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