Prélèvements
Les prélèvements, impôts, taxes, ont mauvaise presse. Ils constituent néanmoins (sous condition d'efficacité et de bonne gestion) des instruments essentiels de développement et de solidarité.
Qu’on se le dise : les prélèvements vont augmenter. Ils auraient déjà du le faire, et c’est ce detard qui est la cause des nombreux déficits que nous observons aujourd’hui.
Mais rassurons-nous : ce n’est pas grave, car ce qui reste après prélèvements va aussi augmenter.
La question démographique a été largement évoquée à propos de la retraite. Nous vivrons de plus en plus vieux, sauf accident, et il va bien falloir nourrir, loger, soigner et distraire tous ces vieux. Le décalage de deux ans de l’âge légal à la retraite ne change rien sur le fond. Nous avons vu sur ce site (voir les notes de la rubrique société –population) que les vieux étaient aussi producteurs de richesses, mais en partie hors champ monétaire. Il faut bien les rémunérer d’une manière ou d’une autre, au-delà du volet purement social. Le débat s’ouvre sur la dépendance. Le premier souci devrait être de la retarder, mais malgré tous ces efforts, elle coûtera de plus en plus cher.
Il n’y a pas que les retraites qui inquiètent. La santé coûte aussi de plus en plus cher. Les déficits s’accumulent. On peut probablement limiter les dégâts par une gestion plus rigoureuse, mais la tendance demeure. Nous sommes plus exigeants, à tous les âges. Ces comptes sont toutefois amputés du volet positif : la santé a une Valeur, une population en forme est un atout économique et social. La situation de certains pays africains, durement touchés par des maladies endémiques, illustre tristement le Coût de la mauvaise santé d’une population. Pour bénéficier de la valeur d’une bonne santé collective, il va bien falloir payer.
Il y a la formation. La démographie, cette fois-ci donne la tendance opposée, il y aura moins de jeunes. Mais ils restent plus longtemps à l’école, leur formation est de plus en plus complexe, la qualité a un coût, dans ce domaine comme dans les autres. La compétence professionnelle et la culture générale sont des richesses pour un pays, mais il faut les maintenir, les cultiver, les adapter sans cesse aux besoins. La formation tout au long de la vie, ça coûte de l’argent.
La recherche est un autre domaine où l’effort doit être soutenu et amplifié, pour se tenir en bonne place dans un monde où l’innovation est la clé de la croissance économique. On pourrait allonger la liste des besoins d’argent, qu’il faut bien trouver quelque part. Ajoutons une dernière rubrique, celle de la lutte contre les exclusions de toutes sortes, conséquences de certaines formes d’évolution techniques et de mondialisation. En faisant l’hypothèse que ces phénomènes sont des sources de réels progrès à une échelle macro économique, il reste des victimes qu’il n’est pas possible d’abandonner à leur sort.
L’automobile et les hyper marchés ont tué les commerces des petits villages. Il faut croire que le bilan est favorable globalement, mais que dire des personnes privées de voiture ? Les personnes âgées notamment, qui ne sont plus desservies par les commerces ambulants de jadis. A moins de les condamner au déménagement en ville, ce qui accélérera leur entrée en dépendance et coutera cher, il est légitime de leur assurer un service, dont le coût est à prélever sur le bénéfice global du système dominant.
Les « fractures » de ce type sont nombreuses, et résultent le l’introduction de nouvelles technologies. Celles-ci sont sources de progrès considérables, que nous estimons globalement positifs, mais laissent pour compte de larges catégories de population qui n’y ont pas accès. La fracture numérique est un autre exemple bien connu de ce phénomène. Il est donc normal que les bénéfices tirés de ces nouvelles techniques viennent au secours de ceux dont la situation s’est dégradée. Globalement, tout le monde doit être gagnant, mais ce n’est pas possible sans prélèvements.
L’objectif de limiter, voir de réduire, les prélèvements n’est pas le bon. Le développement durable nous conduit à s’en tenir à l’objectif primaire, le bien-être de la population, qui doit s’accroître pour tout le monde, chacun à se manière. En se polarisant sur une modalité particulière, nous nous enfermons dans un carcan et réduisons le champ du possible au lieu de l’élargir.
Ce qui nous doit nous guider, c’est l’efficacité en termes de service rendu. Les moyens pour y parvenir sont multiples, et relèvent parfois du marché, parfois de l’action des pouvoirs publics, ou encore de la mutualisation de ressources. Des solutions mixtes seront souvent appréciées, avec des curseurs à régler en fonction des circonstances. Gardons-nous de tout fétichisme qui empêche de penser. Vaut-il mieux payer la Route par les Impôt –ce qui nécessite un prélèvement - ou par le péage ? Ne nous faisons pas d’illusion, il faudra toujours payer le service rendu, et la réponse à la question n’est pas Unique. Le prélèvement n’est pas toujours obligatoire de droit, mais il l'est de fait. Il toujours bien réel.
Il y aura donc toujours des prélèvements, et beaucoup de facteurs laissent penser qu’ils augmenteront. Ils sont mal vécus, bien sûr, car ils sont toujours douloureux, et ils le seront d’autant plus qu’ils apparaissent mal répartis : l’équité doit être au rendez-vous. L’efficacité aussi, selon des objectifs clairement exprimés et réévalués régulièrement. Pour que le bien être, la qualité de vie, puissent continuer à progresser.
Chronique mise en ligne le 27 décembre 2010, comme cadeau de Noël !
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