Investissement
Faire du développement durable, c’est entrer dans le monde de demain. C’est avant tout un investissement. Pas sans risque, comme tous les investissements, mais chacun le sait, sans investissement, il n’y a pas d’avenir…
A quoi bon tous ces efforts, si nous sommes les seuls ? Comment lutter contre l’effet de serre, si les américains et les chinois refusent de s’engager ? Voilà des phrases souvent entendues, et qui témoignent d’une sorte de découragement devant l’ampleur de la tâche.
Ce sont de bonnes questions, si l’on pense que les efforts nécessaires pour le développement durable relèvent de l’abnégation, de la vertu, du sacrifice. Il s’agirait alors d’une bonne action pour la planète, une BA, fort sympathique, mais c’est vrai, il est permis de s’interroger sur son efficacité. A quoi bon, n’y a-t-il pas d’autres BA plus modestes mais plus efficaces ?
Heureusement, ce point de départ n’est pas le bon. Pas question de « faire du développement durable » par altruisme, juste pour faire du bien autour de soi, comme une œuvre de charité. Les efforts pour le développement durable relèvent de l’intérêt. Ce sont des investissements. Si les autres ne font rien, ce qui n’est pas si évident, tant pis pour eux. Ils prennent du Retard, et réjouissons-nous, ils devront bientôt venir nous voir pour trouver les brevets de demain, les savoir faire du futur. Il y a un nouveau monde à imaginer et à mettre en marche, ce ne se fera pas sans investissements, mais de grâce, ne parlons pas de vertu, ce n’est que de l’intérêt bien compris.
Abandonnons donc les questions dénuées de sens sur l’intérêt à s’engager, pour se concentrer sur les questions pratiques, la manière de faire, le bon moment, les réseaux d’appui à constituer pour soutenir l’investissement, y compris auprès des structures les plus modestes, qui ne sont pas les moins créatives pour autant. L’économie est rythmée par des cycles, et il faut savoir s’y intégrer, pour le développement durable comme pour les autres valeurs d'avenir. A défaut, le risque d’essoufflement serait trop fort, et pourrait compromettre les chances de succès. L’investissement prend de nombreuses formes, matérielles comme des Achats de produits, ou immatériels comme de la recherche, de la formation, de l’organisation. Il comprend notamment l’Analyse des besoins de demain, son propre bilan de compétences, la recherche de partenaires. Chaque entreprise, chaque collectivité, développe sa propre stratégie, en fonction de ses forces et de la situation du secteur où elle opère.
Le rôle des pouvoirs publics est d’accompagner le mouvement, de lui donner plus de force et de cohérence. Il convient aussi d’anticiper, de créer le contexte favorable aux Investissements des entreprises. Un exemple aujourd’hui classique se trouve dans l’énergie, que l’on peut décliner de multiples manières.
Le carburant est cher, de plus en plus cher. Pauvres automobilistes, que vont-ils devenir ? C’est l’occasion de leur apprendre à mieux conduire, et à s’organiser autrement. Un investissement qui sera rentable pour toujours. La formation à la condiute douce fait faire bien plus d’Economies que les « cadeaux » que l’Etat consent sur ses taxes. L’encouragement au covoiturage (installation d’aires de regroupement, par exemple, création de sites Internet dédiés, etc.), l’aide aux transports « à la demande » dans les zones rurales, sont des réponses structurelles à un problème structurel. L’énergie chère est d’ailleurs moins un problème que les fluctuations du prix de l’énergie. Les répits conjoncturels, embellies de courte durée, sont de mauvais amis, car ils provoquent de faux espoirs. Un coût élevé mais stable permet de construire une politique dans la durée, d’assurer des retours d’investissement, d’organiser le soutien aux plus faibles sur des bases solides. Les périodes de baisse des cours offriraient une opportunité de recettes fiscales bien utiles pour financer de la Recherche et Développement, ou encore les investissements nécessaires aux économies permanentes.
Les pouvoirs publics peuvent également créer des lieux et des occasions de rencontre entre des partenaires potentiels. C’était le rôle des anciennes commissions du plan, qui permettaient à la fois de se connaître et de regarder ensemble les défis à relever. Le Grenelle de l’Environnement a rempli également cette fonction, et nombreux sont les secteurs qui, aujourd’hui, demandent leur propre Grenelle. Ce ne sont pas des politiques onéreuses, il s’agit d’aider l’ensemble des acteurs à adopter une vision commune de l’avenir, pour que chacun puisse investir à bon escient.
On pourrait multiplier les exemples d’intervention des pouvoirs publics pour favoriser l’investissement dans les champs d’avenir, études prospectives, recherche, formation, missions internationales, garanties aux investisseurs, etc.
Le développement durable est la recherche d’un monde nouveau, qui ne soit pas un simple prolongement tout juste modernisé de ce que l’on a toujours fait. Il demande un investissement multiforme, de tous les acteurs de la vie économique et sociale. C’est toute la société qui doit être mobilisée, pour que cet investissement soit supportable, et aussi efficace que possible.
Chronique mise en ligne le 7 février 2013
- Vues : 3304
Ajouter un Commentaire