Agenda
Un mot courant, qui renvoie en ce début d'année au petit cahier où l’on note ses rendez-vous, et ce que l’on ne doit pas oublier. Ce sont les choses à faire qui sont ainsi consignées sur ce livre que l’on appelle agenda. Certains agendas sont simples, et ne comportent que quelques indications essentielles, date, lune, heures de lever et coucher du soleil, saint du calendrier, d’autres comportent de nombreux détails pratiques, comme les dates des vacances, les fêtes de tous les pays du monde, des adresses utiles, ou la promotion de celui qui vous l’offre, entreprise qui vante ses produits, collectivité ou association qui présente leurs activités, avec un mode d’emploi, horaires téléphones, etc.
Quand ils sont trop riches, ils changent de nom et deviennent Almanach, comme le célèbre almanach Vermot, rempli de bons conseils et d'histoires drôles. Ils connaissent cette année deux applications au développement durable.
Le mot agenda est resté dans le vocabulaire codé du développement durable, affublé d’un numéro, agenda 21. Le mot n’est pas français, c’est du latin pur sucre, mais tellement approprié pour les carnets de rendez-vous qu’on avait cru que c’était du français. De peur que les gens ne comprennent pas, et aussi pour se distinguer, se démarquer de l’usage courant du mot, et lui donner une allure bien particulière, les spécialistes ont traduit le mot en action, pour remplacer ce qu’il faut faire. On parle aujourd'hui d'Action 21, pour désigner le programme des Nations Unies sur le développement durable. Pourquoi pas, mais on se demande où est le plus ?
C'est donc à Rio de Janeiro, en juillet 1992, que le concept prend forme, dans le cadre de la conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement. Le programme d'action pour le 21ème siècle, ou sont traités les grands enjeux à l'échelle de la planète. Outre le préambule qui rappelle le contexte à la veille du 21ème siècle, quatre chapitres à cet agenda : les dimensions sociales et économiques (où l'on trouve notamment les questions de santé, de pauvreté, de modes de consommation, de processus de prise de décision), la conservation et la gestion des ressources aux fins de développement (où sont évoqués l'agriculture, la biodiversité, les océans, les déchets dangereux, etc.), le renforcement du rôle des principaux groupes (les jeunes, les femmes, les collectivités locales, etc.), et les moyens d'exécution de ce programme ambitieux (mécanismes financiers et juridiques, recherche, formation et transfert de technologie, etc.). Bref un tableau large d'un vaste effort à entreprendre en bonne harmonie entre tous les Etats.
Ce principe, élaboré au niveau de la planète, est-il transposable à d'autres échelles ? Les collectivités locales ont été les premières à se lancer dans cette aventure, dès 1992 en marge de la conférence officielle de Rio, et puis la formule a fait des petits. Le relais a été pris par diverses institutions, des chartes régionales (au sens de l'ONU, l'Europe, la Méditerranée, etc.) incitant à se doter d'agenda 21 locaux ont été rédigées, des réseaux d'experts et d'élus ont été créés, et on parle aujourd'hui d'agenda 21 de villes, d'agglomérations, de départements, de régions, pour les collectivités, mais aussi d'agenda 21 d'entreprises (grandes et petites), ou d'établissements scolaires. Restons un instant sur cet exemple. Il s'agit de mobiliser l'ensemble de la communauté d'un établissement, école communale ou université, au delà des clivages et fonctionnalités habituelles, pour que le projet d'établissement soit un vrai projet de développement durable, en combinant toutes les dimensions, pédagogiques, techniques (bâtiments, déchets, cantines, etc.), administratives, fournitures, accès à l'établissement, activités périscolaires, etc. Au delà de l'environnement, qui est souvent à l'origine de telles démarches, c'est un ensemble de valeurs très riche et diversifié qui est ainsi traduit en actions et en comportements, et c'est toute la vie de l'établissement qui en est affectée.
La force d'un agenda, 21 ou non, est bien d'amener à écrire les projets de son auteur sur un document unique, et de constituer ainsi un programme. La simple confrontation des projets, leur mise en perspective avec des engagements moraux et des objectifs généraux de développement durable, conduit à les revoir, à leur donner de la cohérence, et, pour y parvenir, à ouvrir un dialogue entre chaque « porteur de projet ». Le développement durable est en marche !
La stratégie nationale de développement durable que la France a adoptée en juin 2003 a fixé un objectif chiffré pour les agenda 21 des collectivités territoriales : 500 en 2008. Comme il n'y a pas de norme européenne ou internationale sur les agenda 21, comme il y en a pour le management environnemental par exemple, le ministère de l'écologie et du développement durable a mis sur pied un « cadre de référence » qui permet de les reconnaître et ainsi de les comptabiliser.
Un tel cadre est nécessaire, et rendra de grands services, comme les recettes évoquées sur ce blog, à condition de savoir l'adapter aux circonstances, notamment les échelles de temps et d'espace. Le caractère stratégique d'un document de cette nature doit être privilégié. La liste des actions n'en est qu'une transposition opérationnelle, qui permet d'y voir clair, d'être concret, de démarrer la réflexion, mais qui doit pouvoir s'adapter en permanence, en référence à des principes clairs, fruits d'un travail collectif et de ce fait faisant consensus, bien au-delà de chaque action isolée. Pour entraîner tous les acteurs, l'agenda 21 doit avant tout identifier des valeurs partagées et s'appuyer sur elles, en dépassant le fétichisme du plan d'action rigide. Pour être durable, un programme, fut-il un agenda 21 doit se conjuguer avec adaptabilité et réversibilité.
Chronique publiée le 4 janvier 2007
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