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Nourrir le monde

... sans dévorer la planète
George MONBIOT
©Les liens qui libèrent, 2023

Un triste constat et grande ambition animent ce livre : « A bien des égards, notre riposte à la plus grande crise que l’humanité ait jamais dû affronter a été étriquée et timide. Là où notre pensée devrait se faire audacieuse, complexe et holistique, elle demeure cloisonnée, bornée et graduelle ». Une remise en question globale de la situation de la planète et de l’humanité. Au cœur de cette réflexion, l’alimentation des milliards d’humains, et une conviction présentée par l’auteur : « L’agriculture, qu’elle soit intensive ou extensive, est la principale cause de destruction écologique au monde ». Il préconise logiquement « la fin de l’agriculture ».

L’agriculture consomme de l’espace, qu’elle soustrait ainsi à la vie sauvage. Elle détruit souvent les sols qu’elle occupe, alors qu’ils sont une source de richesse mal connue et largement sous-estimée. L’élevage en est largement responsable, par les terres qu’il occupe et celles mobilisées pour produire les aliments du bétail. « L’élevage d’un kilogramme de protéines de bœuf libère 113 fois plus de gaz à effet de serre que la culture d’un kilogramme de protéine de pois, et 190 fois plus qu’un kilogramme de protéines de noix. » S’en passer permettrait de réduire de 76% la surface des terres agricoles.

L’auteur est un conteur. Il nous emmène avec lui dans ses visites de fortes personnalités qui expérimentent de nouveaux modèles de production, des modèles qui permettraient encore de réduire les surfaces agricoles. Il faut augmenter les rendements, sans pour autant détruire les sols par des apports extérieurs. Nous voici avec Tolly, ou bien Tim ou quelques autres, qui sont parvenus à coupler production intensive et enrichissement des sols. Nous retrouvons la voie explorée par Marc Dufumier, qui nous dit dans son livre « L’agroécologie peut nous sauver » : « Il est possible d’intensifier la production à l’hectare par des voies intensément écologiques ». L’auteur passe en revue de nombreuses bonnes idées, le bio, le vegan, le local, le petit face l’industriel, etc. Il casse bien des idées reçues, et ne trouve pas, en définitive, de solution à la hauteur des défis d’aujourd’hui, climat et biodiversité d’un côté, et lutte contre la faim dans le monde de l’autre.

Retour à la terre, après ce tour d’horizon. Ce sont les bactéries qui en font la richesse, et l’idée vient de court-circuiter le maillon « agriculture » pour en tirer directement une alimentation de qualité, en quantité, et de faible occupation de l’espace. Plusieurs chercheurs proposent dès aujourd’hui des protéines issues de la fermentation microbienne. Nous sommes habitués, elles sont déjà dans nos aliments comme les laitages, et les recherches semblent prometteuses. Il restera à faire accepter aux consommateurs ces nouveaux aliments, une approche plus culturelle que technologique.

Un livre agréable à lire, conçu comme un reportage, ponctué de quelques références à Machiavel et à Kant, qui ouvre des perspectives et provoque le débat.

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