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Le choc des espèces

Renaud Large
©Editions de l’Aube, 2022, collection « ça va bien se passer »

Un livre sur la tolérance, pour inaugurer la collection « ça va bien se passer », qui s’adresse « à la majorité silencieuse désireuse de comprendre, sans s’énerver, les bascules de notre temps ». La chasse et la consommation de viande, le « carnisme », offrent un champ de bataille où s’affrontent les pro et les antis dans des termes violents et définitifs. L’auteur évoque « une vulgaire bagarre de cour d’école, où rivalisent des niaiseries immatures et des postures faciles ». « Chasseur repenti », il fait le pari, non pas de réconcilier les camps opposés, mais de créer les conditions d’un dialogue apaisé. La condition animale, la relation homme-animal, mérite mieux que des insultes ou des pugilats stériles. Deux sujets, donc, dans ce livre, le choc des espèces en première ligne, et caché derrière, la qualité des débats, la modération, la capacité dans notre pays à travailler avec des gens dont nous ne partageons pas les idées. C’est tellement plus facile, et plus « vendeur », de se montrer absolus, 100%, sourds et aveugles à tout ce qui n’est pas conforme à sa vision du monde, que d’accepter d’écouter et de chercher à comprendre les arguments des autres, lesquels ne sont pas forcément des idiots ou des salauds.
La condition animale est un merveilleux sujet pour traiter de la difficulté du dialogue dans le monde d’aujourd’hui, tant il fait appel à notre sensibilité (toujours susceptible de basculer vers la sensiblerie) et tant les positions de départ sont antagonistes. Quoi de plus clivant que la chasse, l’élevage, la corrida, les bêtes de cirque, et les zoos ? La guerre entre les spécistes et les antispécistes est une affaire de civilisation. Les anti veulent « réduire ou faire disparaître les barrières entre les espèces », et aller ainsi bien au-delà des simples droits de l’animal. La déclaration des droits de l’animal affirme la responsabilité du bien-être des animaux à ceux qui en ont la garde. Il s’agit plus des devoirs des humains envers les animaux que des droits des animaux à proprement parler.
Cette guerre est multiforme, comme les autres. Il y a les plateaux de télévision et les réseaux sociaux, où l’affrontement est bien visible, et parfois violent. Il y a le cinéma, qui colporte des valeurs, qui crée un paysage particulier, bien loin de la réalité, de la vraie vie, Disney et les cartoons en étant des exemples bien connus. Il y a des rumeurs, des contre-vérités ou vérités partielles qui circulent et compromettent tel ou tel camp, des imaginaires à mettre en vedette pour renforcer des positions, il y a des lobbys, comme ailleurs, pour soutenir la cause. Renaud Large expose toutes les manières de faire cette guerre, dont les victimes sont souvent les animaux, instrumentalisés à d’autres fins qu’à leur protection.
Il propose d’autres manières d’entrer dans le sujet, en le mettant en perspective, en l’élargissant, en le regardant de différents points de vue, notamment culturels et juridiques. Il met en lumière la complexité des relations homme/animal. La bagarre de cour d’école peut être évitée. Vous allez voir, « ça va bien se passer ».

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