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Eoliennes pourquoi tant de haine ?

Cédric Philibert

© Les petits matins, 2023

Les éoliennes sont entrées dans notre univers. Bien vues d’une large majorité des Français selon un sondage Harris-Interactive de juillet/août 2021, et encore mieux par ceux qui vivent à moins de 10km d’une éolienne, elles font l’objet d’une campagne active de dénigrement, fondée sur un grand éventail d’infox, les fake-news en bon français. Le mot « haine » n’est pas trop fort pour exprimer ce sentiment de rejet, et il interroge : Pourquoi ? Même les députés EELV semblent réservés, sensibles aux arguments des « anti ». Curieusement, les partisans de la décroissance se retrouvent aux côtés des défenseurs des énergies fossiles et du nucléaire.

 

La perspective de l’abandon des énergies fossiles pour cause d’effet de serre a provoqué de nombreux scénarii sur l’avenir énergétique de la France, internationaux comme celui de l’agence internationale de l’énergie (AIE), ou français comme le rapport du Réseau de Transport de l’Electricité (RTE) ou de l’ADEME. Toutes les analyses convergent : les énergies renouvelables sont incontournables, avec ou sans nucléaire, et les éoliennes y tiendront une part importante. Comment expliquer cette situation paradoxale, d’un côté l’affirmation de la nécessité absolue des éoliennes, et de l’autre, une véritable haine à l’égard desdites éoliennes ? L’ouvrage de Cédric Philibert, expert en la matière, reprend les termes du débat, et nous donne les clés pour en comprendre les enjeux.

Une bonne nouvelle, pour donner un fond de décor « Nous avons désormais les moyens d’un découplage absolu et mondial entre croissance économique et émission de gaz à effet de serre -au moins celles, très largement majoritaires, qui sont liées à la production et la consommation d’énergie ». Les outils existent, il ne tient qu’à nous d’en faire bon usage. Un état des lieux précis sur les moyens de produire l’énergie dont nous avons besoin nous donne une vue d’ensemble sur les éoliennes dans le mix énergétique français, et son évolution. Le constat est clair, et il réfute une bonne partie des arguments anti-éoliens : les éoliennes sont compétitives. Elles aurons d’ailleurs remboursé au printemps prochain l’intégralité des aides dont leur démarrage a bénéficié (11 milliards d’euros, de 2003 à 2021), et rapporteront « des dizaines ou des centaines de milliards d’euros aux finances publiques d’ici à 2046 selon l’évolution des prix du marché ». Voilà enterré l’argument selon lequel les éoliennes coûtent cher à l’Etat. La comparaison avec le nucléaire s’imposait, tant l’opposition à l’éolien est combinée avec la foi dans le nucléaire. Une comparaison éclairante, au niveau national comme mondial, qui met en évidence les incertitudes qui pèsent aujourd’hui sur le nucléaire, qui ne sera qu’un appoint dans la plupart des pays à l’exception de la France, si l’on en croit les intentions affichées.

Le fond de décor, c’est aussi l’électrification de nombreux usages aujourd’hui alimentés par d’autres formes d’énergie. C’est ce qui explique que, alors que nous devrons réduire notre consommation globale d’énergie, celle d’électricité doit augmenter fortement. Mobilité et chauffage domestique, et une partie des industries dépendent aujourd’hui du pétrole, du gaz ou du charbon, et devront, décarbonisation oblige, passer à l’électrique. Une mutation profonde pour laquelle les renouvelables et notamment l’éolien, seront déterminantes. Cédric Philibert inscrit son livre dans le temps, en se référant en permanence aux progrès de la filière éolienne, face à l’urgence du besoin.

Il passe au crible l’ensemble des arguments déployés par les « anti ». L’intermittence, des facteurs de charge trop faibles, des matériaux rares qui nous condamneraient à de nouvelles dépendances, emprise au sol défavorable à la production alimentaire et à la biodiversité, les oiseaux et les chauves-souris victimes des coups de pales, etc. et répond aux multiples « y a qu’à » de tous ceux qui proposent d’autres solutions, du type « Y a qu’à utiliser massivement l’hydrogène ».

Les réponses entrent dans les détails, face à des allégations grossières, là où le diable se trouve habituellement, et se fondent sur des chiffres dont le nombre pourra impressionner ceux qui les redoutent. L’ouvrage conclut sur l’actualité de la loi d’accélération qui pourrait bien se révéler être un frein dans la pratique administrative de notre pays. Une occasion ratée. Mais un livre réussi, qui remet les pendules à l’heure. Il était temps !

 

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