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Un vent mauvais

Faites vous-même votre malheur. Une formule caricaturale, mais parfois porteuse d’une part de vérité. Prenez l’écologie. Beaucoup d’ennemis, de personnes ou d’organismes qui ne veulent pas entendre un message qui les dérange. Mais aussi beaucoup de maladresses des écologistes, crispés sur l’alerte, maintes fois répétées et associée à la culpabilité et même à la honte, au lieu de mettre l’accent sur la qualité de la vie des humains, si ceux-ci respectaient les autres êtres vivants, ou encore sur les opportunités qui pourraient naître de la nécessité de changer de modèle économique.

Les porteurs des valeurs démocratiques portent aussi une part de responsabilité face à la montée des tenants des régimes autoritaires. La recherche d’un consensus, d’une vision partagée du futur est abandonnée dans les faits comme dans les discours. C’est le combat qui est mis en scène. Il faut des clivages pour que les choix soient clairs, nous dit-on. Le fait que 51% des électeurs (et sans doute guère plus que 30% des citoyens) imposent leur volonté aux 49% autres ne semble pas poser de problème. Drôle de conception de la démocratie, dont la conséquence est que la conquête du pouvoir est devenue le sujet central de la vie politique, au lieu et place de la recherche de l’intérêt commun autour d’un projet largement partagé.

Ajoutez-y le poids des professionnels de la politique, qui en éloignent les simples citoyens, pauvres amateurs. Les énarques ou équivalents ont pris progressivement la place des citoyens de base, ouvriers, paysans, médecins, avocats, enseignants, artisans, commerçants, etc. qui composaient autrefois nos assemblées. Et quand la « société civile » parvient à des postes de responsabilité, les professionnels ne tardent pas à leur montrer qu’ils ne sont pas à leur place, ils ne connaissent pas les codes du métier. L’incompréhension entre ces nouvelles élites et la population en est pour partie une conséquence.

Batailles, parfois de chiffonniers, et décisions confisquées par la technocratie, la démocratie est mal en point. Le « vent mauvais » devient dangereux.

En cette veille d’élections européennes, je vous propose la reprise de trois mots entrés depuis longtemps (respectivement en aout 2016, mars 2010 et juillet 2008) au dictionnaire du développement durable : Démocratie, Election et Europe. Des mots datés, écrits dans différents contextes, mais l’essentiel est toujours d’actualité. Extraits.
« La bonne gouvernance, une des bases bien connues du développement durable, suppose qu’il y ait des gouvernants, qui décident, à l’aide de processus de décision qui doivent être à la fois ouverts et efficaces. Ouverts, pour ne pas reproduire à l’infini les vieilles formules, intégrer en continu les innovations sociales et technologiques, et ne pas être prisonnier de modèles dominants qui deviennent inévitablement conservateurs. Efficace, parce que les enjeux sont pressants, et qu’il faut dégager des consensus pour des décisions lourdes. Il s’agit de créer une dynamique collective, fondée sur l’adhésion la plus large à un projet construit ensemble ».

« Les élections privilégient les thèmes du moment, les problèmes immédiats, le court terme. Elles exacerbent les clivages et la division de la population concernée, et provoquent des surenchères, les éternelles promesses intenables. Trois caractéristiques, court terme, clivages et surenchères qui ne conduisent guère à ce que l’on appelle la « bonne gouvernance », qui permet de voir loin, de rassembler la population sur un projet partagé et de créer la confiance avec les dirigeants. La démocratie, fondée sur des élections, est-elle « durable » ?

 

Réveillez-vous !

Edito du 5 juin 2024

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