Du bon usage de la voiture électrique
Des grosses voitures, une faute sans doute, mais électrique, donc à moitié pardonnée. Vraiment ? Même électrique, une grosse voiture consomme plus d’énergie qu’une petite. Ne serait-ce qu’à cause de son poids, sans parler des nombreux gadgets qui s’incrustent sur les séries haut de gamme. S’il s’agit de lutter contre l’effet de serre, la première piste à suivre est bien sûr de consommer moins d’énergie pour un service donné. La meilleure énergie est toujours celle que nous ne consommons pas, il faut le rappeler. Quelle qu’en soit l’origine, l’électricité a un impact sur l’environnement, plus ou moins grave et de différentes natures. Priorité numéro 1, réduire la consommation d’énergie primaire, celle qui est produite au début de la chaine d’alimentation de votre voiture. Priorité numéro 2, ensuite, choisir l’énergie la moins polluante pour l’usage recherché. Une grosse voiture pour conduire une personne sans bagages, même électrique, est une faute vis-à-vis du climat, et de bien d’autres choses, comme les ressources en matières premières, et l’encombrement de l’espace public.
Vous m’objecterez que les usages varient, et qu’il est juste de calibrer sa voiture en fonction du besoin le plus exigeant. Qui peut le plus peut le moins, et cette voiture pourra assurer les départs en vacances d’une famille nombreuse et les déplacements individuels de Monsieur ou de Madame. L’idéal serait alors de pouvoir choisir sa voiture en fonction de besoin, au coup par coup. Nous y sommes. Rappelons-nous qu’une voiture ne roule que 5% de son temps, le reste étant en stationnement. Elle coute en moyenne à peu près 5000 € par an à son propriétaire. Beaucoup d’argent pour un usage restreint, un « pognon dingue » pourrait-on dire.
Toute forme de mutualisation, commerciale ou associative, qui permettrait de partager les voitures, pour les ajuster aux besoins réels, leur taille notamment et leur type d’énergie, serait bienvenu, à condition que la mise à disposition soit assurée et facile. Les voitures en libre-service répondent à ces exigences, de même que les locations de plus longues durées. Il est possible de disposer de la voiture idéale en faisant des économies et sans avoir à se préoccuper de son entretien, de l’assurance, etc. Du gagnant-gagnant.
Revenons à notre grosse voiture électrique. Une aberration le plus souvent pour un usage individuel, mais un élément utile dans une gamme de voitures accessibles en tant que de besoin.
Une autre curiosité mérite réflexion. Le voyage longue distance en voiture électrique. Bien compliqué. Il faut refaire le plein plusieurs fois au cours du chemin, et chaque plein dure « un certain temps » comme dirait Fernand Raynaud. Les constructeurs cherchent à allonger le rayon d’action, l’autonomie, mais un kilo de batteries accumule bien moins d’énergie qu’un kilo de pétrole. Ne serait-il pas plus sage de réserver les voitures électriques à des déplacements plus courts, réguliers et bien organisés, et de faciliter au maximum la combinaison voiture-train ? De chez vous à la gare en voiture électrique (ou en transport en commun), long voyage en train, et voiture électrique entre la gare d’arrivée et la destination finale. Il faudrait pour cela investir dans les correspondances, les charnières, les ruptures de charge. Dès la billetterie, un seul billet pour les trois parties du déplacement et les réservations ; les horaires et les garanties de maintien des correspondances en cas d’incident, etc. La question des bagages mérite notamment une attention particulière. L’intermodalité est la solution de la sagesse, mais il faut la rendre facile et agréable. C’est là qu’il faut innover, et pour cela investir de la matière grise. Ce sera sans doute plus intéressant pour l’impact environnemental du service rendu, que la course en avant le l’autonomie des voitures électriques. Une approche par l’immatériel, le génie humain, plutôt que par le « plus de matériel ».
L’abandon du carbone et de la combustion bouscule nos habitudes. La découverte ou la capture du feu a joué un rôle majeur dans l’évolution de l’humanité, mais il faut aujourd’hui trouver des substitutions, tout comme il faut intégrer dans nos esprits la « finitude » du monde. L’avenir est à la créativité, et aux modes de penser qui la favorisent.
Edito du 19 janvier 2022
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