Vive le train !
Relance du fret ferroviaire, trains de nuit, les annonces sont fortes en faveur du train. Elles vont à contre-courant de la tendance observée, et demandent une réelle volonté politique pour les faire aboutir. Au-delà du succès commercial qui confirmera que l'initiative répond à un réel besoin, il y a plusieurs obstacles techniques à surmonter, tant sur les infrastructures que sur la qualité de service, qui constituent des préalables, ou qui se manifesteront très vite. Parmi eux, le bruit. Les trains de marchandises roulent beaucoup la nuit, pour réserver les rails aux voyageurs dans la journée. Sur les grandes lignes, il y a en effet concurrence sur les "sillons", les espaces libres pour caser un convoi. Et il vaut mieux que ces convois avancent à la même vitesse, ça permet d'en mettre plus. Plus lourds, plus longs, plus lents, les trains de marchandises pénaliseraient le trafic sur les lignes fréquentées par les voyageurs, notamment à l'approche des grandes villes.
Il reste donc la nuit, mais ce sont les riverains des lignes qui ne sont pas contents. Les wagons de marchandises sont souvent anciens et bruyants. Ils vous réveillent la nuit pour peu que vous ne soyez pas protégés par des obstacles naturels ou des murs ad hoc. Il n'y aura pas d'augmentation significative du fret ferroviaire sans avoir résolu cette question du bruit. Les réponses existent, avec la modernisation du parc de wagons et de motrices, mais aussi réfection des rails et des zones de transit et autres gares de triage. Des investissements lourds pour l'Etat ou les propriétaires d'infrastructures, et pour les utilisateurs propriétaires des wagons, très souvent des entreprises privées. Des investissements qui s'ajoutent, le cas échéant, à des infrastructures pour faire monter les camions ou des conteneurs sur les wagons. De même, si nous voulons utiliser les infrastructures des transports urbains comme les métros et les trams pour acheminer les marchandises aux centres villes. Bonne idée, mais qui demande des adaptations du réseau et des réponses à la question du bruit, incontournable pour des usages de nuit. Evidemment, il vaut mieux quelques rames de trains plutôt que des kyrielles de camions, aussi bien pour le bruit que pour l'encombrement de l'espace public et l'effet de serre, mais les décisions sur le ferroviaire sont légitimement soumises à des procédures, alors que l'augmentation du trafic routier se fait spontanément sans autorisation préalable. Les victimes du bruit des trains auront plus facilement gain de cause que celles du bruit des camions. Le bruit, vous l'aurez compris, est aussi un facteur limitant pour les trains de nuit de voyageurs. La mise en service de trains de nuit se heurtera selon toute vraisemblance à des oppositions de la part des riverains et de leurs collectivités. Leur abandon progressif a provoqué un soulagement, et un retour en arrière sera mal accepté, si la question du bruit n'est pas résolue. Même pour les lignes des TGV, qui ont été conçues pour un fonctionnement nul la nuit, mis à part quelques rares trains postaux. Les TGV-lit pour relier Paris à Rome ou Madrid, ou encore Barcelone à Berlin en une nuit, comme nous faisions jadis entre Paris et Londres, seraient une bonne alternative aux avions moyen courrier, mais pas sans avoir garanti des nuits silencieuses au riverains. La légitimité de la qualité de vie locale (et du sommeil) et celle de l'effet de serre se trouvent en contradiction, et il n'y aura pas d'issue sans résolution de la question du bruit. Il ne suffit donc pas d'une simple augmentation de l'offre ferroviaire et de la qualité du service pour les usagers. Le train ne retrouvera pas sa gloire d'antan sans lever l'hypothèque Bruit. Un défi à surmonter, qui s'ajoute à l'exploit commercial attendu.
Edito du 29 juillet 2020
- Vues : 956
Ajouter un Commentaire