La constitution au secours de la planète
C'est la charte de l'environnement, inscrite dans le préambule de la constitution en 2005, qui a permis au Conseil constitutionnel de s'opposer à un recours des fabricants de pesticides interdits en Europe, qui voulaient pouvoir continuer à en produire pour les exporter. Des produits nocifs pour la santé des hommes et pour la planète, eau, biodiversité, sols, etc. La préservation de l'emploi, invoqué par les indutriels, semble prévaloir à leurs yeux sur la santé des asiatiques et autres africains auxquels ces substances étaient destinées. Le Conseil constitutionnel ne l'a pas vu de cette façon-là, et a rejeté le recours, qui portait précisément sur la liberté d'entreprendre. Un droit qui vient de loin, de 1789 exactement dans la déclaration des droits de l'Homme.
Les sages, comme il est d'usage de les appeler, ont affirmé que la valeur constitutionnelle de la protection de la santé et de l'environnement pouvait s'opposer à la liberté d'entreprendre. L'article incriminé de la loi dite EGALIM issue des états généraux de l'alimentation, interdit la production, le stockage et la circulation de certains produits phytosanitaires, ce qui de fait en interdit l'exportation. Et bien, les atteintes à l'environnement même en dehors de nos frontières sont à prendre en considération. Le lobbying des industries concernées mettait en avant l'emploi, menacé si la fabrication de ces produits en France était arrêtée. On peut effectivement le regretter, mais comment se fait-il que des entreprises puissantes, avec des services de prospective compétents, n'aient pas amorcé leur reconversion et préféré jouer la carte du chantage à l'emploi pour faire durer le "non durable" ? L'avertissement est ancien et bien connu, c'est même un gouverneur de banque centrale, celle d'Angleterre, Mark Carney, qui l'a théorisé dans un discours célèbre devant les Lloyds en 2015. Il vaut mieux, pour les investisseurs qui veulent maîtriser leurs risques, mettre leur argent dans l'avenir que dans le passé. Ce n'est pas la première fois que le Conseil Constitutionnel tranche au bénéfice de l'environnement, et de l'environnement mondial plus particulièrement. Le 11 octobre 2019, il avait déjà rejeté le recours de Total sur les huiles de palme, au motif des conséquences des exploitations de palmiers à huile sur l'effet de serre. Là encore, la liberté d'entreprendre avait été mise en avant par Total, mais celle-ci ne peut être exercée n'importe comment, sans référence aux impacts environnementaux. Les temps changent. A bon entendeur, salut !
Edito du 5 février 2020
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