La bonne question
Un bon débat, ce sont de bonnes questions. Ce n'est pas facile de trouver les bonne questions, celles qui n'enferment pas le débat au lieu de l'ouvrir. L'écueil le plus évident est de le lancer à partir de réponses, de solutions toutes faites proposées aux assemblées et aux groupes de citoyens. Des solutions miracle comme le référendum d'initiative populaire pour prendre un exemple à la mode. Le débat se cristallise vite, la réflexion est alors confisquée, le futur est enfermé dans ces propositions, alors que les questions, les problèmes à résoudre, comme la pratique de la démocratie aujourd'hui dans notre exemple, n'ont pas été clairement formulés ou ne l'ont été que partiellement, et qu'il n'y a pas de consensus sur l'objet véritable du débat. Poser les questions, et se mettre d'accord sur leur signification est la première étape de tout débat réellement ouvert. Plus de justice fiscale est une bonne entrée, et non telle ou telle mesure envisagée (ISF, CSG, taxe carbone, etc) qui réduirait le débat et empêcherait de chercher au-delà des solutions habituelles. Pour chercher des exemples dans la "lettre aux Français", "Qu'attendons-nous des parlementaires" est la question préalable à toutes les autres sur leur nombre, leur mode d'élection, ou le rôle de telle ou telle assemblée. Je ne l'ai pas trouvée, même si elle n'est pas interdite... Les questions trop précises empêchent souvent de remonter à l'origine des problèmes, et entraînent sur des pistes sans issue. En focalisant l'attention, elles compromettent la recherche de solutions inédites, réellement novatrices. Adieu la créativité, alors que nous en avons bigrement besoin pour sortir de nos contradictions. On retombe vite dans un catalogue de mesures le plus souvent marquées idéologiquement, ancrées dans des imaginaires des siècles passés, entrainant une confrontation rituelle sans espoir de consensus. Les questions trop précises peuvent aussi fausser l'approche du sujet : "Comment finance-t-on la transition écologique" suggère que celle-ci coute cher, alors que c'est la non-transition qui coûte cher, la prolongation des vieilles pratiques. L'exercice est délicat, de formuler les bonnes questions, assez claires et évocatrices pour que tout le monde sache de quoi on parle, quels sont les enjeux, et donner envie de participer, et "en même temps" assez ouvertes pour ne pas orienter le débat, en réduire la portée, en exclure de fait les propositions inédites, et recycler de vieilles lunes. Souhaitons à tous ceux qui animerons les débats, localement ou nationalement, de trouver la voie étroite entre ces écueils, c'est la condition du succès.
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