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Du coût perçu au coût social

Vous connaissez le célèbre adage : Privatisation des bénéfices, socialisation des coûts. Une pique qui vise le grand capital, pour être caricatural, mais qui concerne beaucoup plus de monde, et notamment des modestes citoyens qui font des dégâts dans leur vie courante. Ce que l'on appelle les "coûts externes" sont par nature socialisés, et payés par tout le monde. Et ils sont lourds, 100 milliards d'euros pour la pollution de l'air, produite en bonne partie par l'automobile au détriment des citadins, 60 pour le bruit. Ils sont élevés mais pas facturés, ils ont fait leur trou progressivement, de manière indolore. Ils ont été intégrés dans les calculs économiques des acteurs. Valeur zéro, puisque ce ne sont pas eux qui les assument. Tout retour en arrière, ou toute application simple du principe "pollueur-payeur", devient une affaire d'Etat.

Qui paye, par exemple, pour les méfaits du bruit, si ce n'est, mis à part le cas des aéroports, les riverains des axes routiers et des boites de nuit, en dépréciation de leurs biens et surtout en mal-être, en coûts de sommeil et de vie sociale dégradée ? Autre exemple, ancien mais remis récemment d'actualité : les pesticides, dont une des conséquences s'appelle "marée verte", qui coute cher en matière de tourisme, aux conchylicteurs, aux collectivités locales et en multiples dégradations de milieu marin, sans parler de santé publique. Bénéfice pour les agriculteurs, coûts pour les autres...
Revenons à l'automobile. Son vrai coût n'est pas celui du carburant, de l'entretien et de l'assurance. Il faut y ajouter les routes, à entretenir, le prix des pollutions de l'eau et de l'air, des accidents de la route, largement pris en charge par la sécurité sociale, et par la douleur des victimes. Les taxes prélevées sur le prix du carburant ne vont pas directement financer ces charges, mais entrent dans le budget de l'Etat qui en a la responsabilité. Elles sont grosso modo du même ordre de grandeur, "l'automobiliste vache à lait" est globalement un mythe. On peut juste s'interroger sur la répartition de la facture, les poids lourds usant beaucoup plus les routes que les perites voitures, et payant moins de taxes...  Quant à l'effet de serre, il a un coût supporté par des des populations très diverses, parfois éloignées dans le temps et dans l'espace. Payer le prix du carbone n'est pas une taxe supplémentaire, ce n'est que la compensation approximative de la dégradation provoquée par l'usage de carburant fossile. Evidemment, il n'était pas compté auparavant, et il apparait comme une sur-taxe, qui déséqulibre les situations personnelles. Entre le coût perçu et le coût social, intégrant toutes les coûts externes, financiers ou moraux, affectant la vie quotidienne comme les ressources des générations futures, il y a un écart longtemps masqué, mais qui se révèle aujourd'hui. Il revient aux politiques publiques de les intégrer progressivement dans la vie réelle, en s'attaquant au difficile problème de leur acceptabilité. 

 

Edito du 16 octobre 2019

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